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                     SUR LA PEINTURE A HUILE.                           73
tous les temps les terribles et funestes effets. Cette détes-
table envie conduisit le poignard qui frappa Pergolèse
au milieu de la gloire qu'il s'était acquise par son fameux
Stabat, et ce fut cette même passion qui versa au Domi-
niquin le poison par lequel se termina une vie que la persé-
cution de ses rivaux lui avaient rendue si malheureuse.
   André ne retira pas de son crime tout le fruit qu'il en
avait attendu ; il eut, il est vrai, un rival dangereux de moins,
mais le procédé de la peinture a l'huile, que lui avait com-
muniqué son confiant ami ne put pas être tenu assez secret
pour qu'il en fût seul possesseur, et se répandant peu à peu
en Toscane, il vit avec fureur, paraître de son temps plu-
sieurs tableaux de différents peintres par cette nouvelle mé-
thode ; ainsi, l'exécrable perfidie par laquelle il avait cru
s'assurer la propriété d'une si belle découverte ne servit
qu'à attirer sur sa tête la malédiction de ses concitoyens
lorsque son crime fut connu, et lui mériter une note d'in-
famie dont l'histoire conservera toujours le détestable sou-
 venir (1).                                 MARTIN-DAUSSIGNY

   (1) Les procédés découverts par Jean de Bruges ne sont plus en usage
depuis longtemps. Certains perfectionnements apportés dans la clarifica-
tion des huiles et la substitution de celle de pavot tout à fait incolore, à
celle de lin ou de noix, ont fait abandonner depuis deux siècles les pro-
cédés employés aux XV e et XVI e . Nous ne regardons point cela comme
un bonheur, car les peintures de Jean de Bruges et autres ont encore au-
jourd'hui, après quatre cents ans un éclat et une vigueur de tons extra-
ordinaires, tandis que nous voyons des tableaux de l'école française qui
n'ont pas cinquante ans de date et dont le coloris est totalement perdu. Si
un certain nombre d'artistes soigneux et consciencieux sont heureusement
parvenus à éviter ce malheur et à n'éprouver dans leurs ouvrages qu'une
légère altération, c'est à force de soins, de précautions et d'étude. La
connaissance approfondie de tout ce qui constitue le matériel de la pein-
ture est indispensable à un ariiste. Les plus célèbres peintres de trus les
temps s'y sont appliqués. Apelles, Timanthe, Zeuxis, Nicias, chez les
Grecs ; Jean de Bruges, Léonard de Vinci et autres chez les modernes
suivirent leur exemple, enfin au siècle dernier, Vien, maître de David, aidé
des recherches de Caylus et de Barthélémy fit ses efforts pour retrouver
l'encaustique des anciens, qui devait nous être rendu plus tard par
M. Paillot de Montabert.