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LE PÈRE DE LA CHA1ZE. 323 idée de l'habileté merveilleuse qu'il dut mettre en œuvre pour franchir de tels obstacles. Libelles, couplets satiriques, pamphlets , histoires scanda- leuses ne cessèrent de l'assaillir de toutes parts durant le cours de son ministère. Nous avons vu, dans sa remarquable lettre du 29 juillet 1687, au général de son ordre, avec quelle sérénité digne et calme il accueillait ces honteuses attaques. C'est qu'en effet, comme il le dit si bien lui-même , « il lui avait toujours paru indiffèrent d'être jugé au point de vue humain; et la seule chose qu'il sollicitât, c'était que Dieu seul fût glorifié.» Ce sont les uniques plaintes que nous ayons pu surprendre dans sa bouche, et bien qu'il eût en main un pouvoir qui dût inspirer de sérieuses craintes à ses ennemis, il ne se vengea de leurs calomnies en toute occasion que par le silence. Plusieurs puissantes cabales s'élevèrent sourdement contre lui pour le supplanter ; il eut l'habileté de les découvrir à temps et de les déjouer sans en tirer vengeance et sans faire le moindre éclat. Les jansénistes, qui n'eurent jamais qu'à se louer de son inal- térable patience, furent précisément ceux qui murmurèrent le plus haut des audiences du vendredi. (1) « Us firent des chan- sons, des prières, des jeûnes, pour que le gouvernail de l'Église fût ôté à son ennemi qui pourtant n'était que le leur : aussi Dieu ne les exauça-t-il point (2). » Quelques-uns d'entre eux, pourtant qui furent témoins, après sa mort, de la brusque suppression de Port-Royal-des-Champs, rendirent à sa mémoire une loyale mais tardive justice. Ils ap- précièrent alors à sa juste valeur l'homme de bien et de con- ciliation que leur s«cte avait si longtemps poursuivi de ses outrages. « Les confesseurs du roi, ditd'Aguesseau, ne s'éloignaient pas des vues pacifiques de l'archevêque de Paris, et le Père de la (1) C'était, comme nous l'avons dit précédemment, le jour consacré au conseil de conscience. (2) La Beaumelle, Mémoires.