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                     EXPOSITION DE 1 8 5 7 .                  275
grand tableau soigneusement fait, mais d'un aspect triste et
d'une couleur faible. Un convoi funèbre dans le désert de Suez offre
un sujet dont le choix n'est assurément pas très-heureux, mais la
scène qu'il représente est composée avec une vérité relative qu'on
ne "saurait nier. L'expression des figures ainsi que leur pose sont
d'un sentiment juste, à la fois bien médité et bien rendu. La
même observation à faire pour la Bohémienne d'Asie-Mineure, en
ce qui touche la faiblesse du coloris et la sécheresse du dessin,
subsiste également pour le Convoi funèbre. C'est en somme de
la peinture traitée avec talent, mais à qui l'intérêt manque à peu
près autant que la couleur. M. Pluyette est moins heureux cette
année-ci que l'an passé. Frère Jean des Entommeurs est un peu
confus, d'une composition pénible et d'un effet papillotant. Le
meunier, son fils et l'âne présente deux jolies têtes de jeunes
filles, gracieuses et d'une bonne expression ; celle du meunier
juché sur l'âne, noyée dans l'ombre d'un grand arbre se voit
mal ; aussi pour avoir un effet matériel quelque peu nouveau,
l'auteur s'est enlevé tout le bénéfice de l'expression. Les rares
 connaisseurs qui demandent à l'œuvre d'un peintre plutôt une
émotion pour le cœur que le plaisir des yeux rendront justice
comme nous au Berceau vide de M. Duveau. En peignant l'afflic-
tion d'un père et d'une mère que la mort a privés de leur en-
fant, l'auteur de ce tableau navrant fait vibrer avec énergie dans
le cœur humain la corde de la douleur et l'impression qu'il donne
 à l'âme se traduit pour les yeux par une tonalité triste, que la
 toile complètement embue ne laisse pas que de redoubler en-
 core ; mais pourquoi chez la mère ce geste indicateur du doigt
 dirigé vers le berceau vide ? M. Duveau, en appuyant ainsi sur
 l'idée mère de son tableau, a-t-il eu peur qu'on ne la com-
 prît pas ?
   Nous avons à signaler dans l'exposition des peintres paysagistes
une fâcheuse lacune résultant de l'abstention de plusieurs maî-
tres du genre. C'est ainsi que MM. Corot, d'Aubigny, Allemand,
Lambinet, etc. n'ont pas jugé à propos de nous envoyer le plus
mince échantillon de leur magnifique talent. C'est là une véri-
table déconvenue pour les amateurs. Espérons qu'aux exposi-