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274                       VOYAGE A VIENNE.

est propre à ce pays. Il ne faut voir en ceci qu'une curiosité
historique classée dans un musée militaire.
    Je laissai bientôt les choses et les souvenirs faits pour
mettre en présence les susceptibilités nationales des deux
peuples. J'étais bien rassuré en tout ce qui touche à la gloire
française. Mon attention se porta sur des objets qui ne pou-
vaient exciter aucune pensée de rivalité. Je m'arrêtai long-
temps à considérer la cuirasse de Gustave-Adolphe, où l'on
voit encore le trou fait par la balle suspecte qui tua, —
traîtreusement peut-être, — cet habile capitaine et ce grand
roi. Que de pensées s'éveillent à la simple vue de cette
cuirasse en buffle percée au dos! Toute cette longue guerre
(la guerre de trente ans1) , si bien racontée par Schiller , qui
en a tiré un de ses héros tragiques, vous revient en mémoire.
J'évoquais les souvenirs de ce grand drame aux cent actes
divers. Je songeais surtout à celle bataille de Lutzen , —
autre champ de bataille illustré depuis par nos armes, — où
le génie de Yallenstein fut vaincu, et où la mort pénétra à
travers la cuirasse de Gustave-Adolphe, qui n'était sans doute
impénétrable qu'aux balles loyales (1).

   (i) Cette cuirasse n'est qu'un justaucorps en buftle, qui devait être d'un
faible secours dans une bataille. Une blessure récente, et point encore
cicatrisée, n'avait pas permis au roi de Suède de prendre, ce jour-là, une
plus forte armure.
   Quant à sa mort douteuse, Samuel Ptifl'endorf, dans son histoire de Suède,
en accuse formellement François Albert, duc de Lauenbonrg, qui, selon cet
historien, était vendu aux Impériaux, et aurait tué Gustave Adolphe d'un
coup de pistolet, dans la terrible mêlée du champ de bataille de Lutzen,
si vivement disputé, Schiller, avec plus de réserve, laisse planer les plus
graves soupçons sur la mémoire de François-Albert de lauenbourg. Il
rappelle que, dans son adolescence, il avait reçu un soumet de Gustave
Adolphe ; que, pendant la bataille, il s'acharna à ses pas et ne le quitta
que quand il le vit blessé à mort ; que, le premier, il donna avis de cette
mort au général ennemi (Wallenstein) ; que, seul dans l'armée suédoise,