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MONCORIN A IRIGNY. 1i 7 Le malheur, qui ne s'arrête pas volontiers quand il pour- suit un homme, sembla vouloir accabler le négociant ; il perdit sa fortune et se trouva dans l'impossibilité de payer les dernières sommes qu'il devait pour l'acquisition de son château. Lorensy avait fait son chemin pendant nos malheu- reuses guerres ; en 1761, d'après sentence rendue le 20 juin pour M. le colonel de Lorensy contre Alexandre Raton , Moncorin revint à son ancien maître. M. Aimé Deveaux, né- gociant, bourgeois de Lyon, en signant, celte môme année, l'acte d'acquisition du domaine, fit don de la somme de deux cent quarante francs, comme dédommagement, à l'ex-soldat Joseph Raton, et le malheureux jeune homme les reçut. Nous sommes arrivé au chapitre le plus brillant de notre histoire, à une époque de richesse et de splendeur. L'Europe se débattait contre nos soldats ; M. Guille, fournisseur de l'armée d'Espagne, possédait le château, y faisait d'immen- ses dépenses pour l'embellir, e t , un jour, dans une lettre confidentielle à sa femme, il écrivait : « Tu peux acheter « pour huit cent mille francs de propriété à Irigny et au- « tour de Moncorin. » A son retour de la Péninsule , le fournisseur prodigua tout pour faire de cette résidence un séjour délicieux. Des eaux abondantes furent recueillies dans de vastes souterrains ; des réservoirs furent creusés, des jets d'eau s'élancèrent étonnés de jaillir du sommet d'une montagne. Le château changea complètement d'aspecl ; les appartements furent décorés dans ce style grec affectionné par David, et le bruit des fêles attira dans les grands salons une société avide de plaisirs. Ce moment d'éclat passa comme tout passe en ce monde. Les changements de haut lieu eurent du retentissement et de l'influence dans toutes les classes de la société. M. Vidalin remplaça M. Guille à Moncorin, et, bientôt après, ce fut la famille de La Blanche qui se trouva en possession de ce séjour.