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284                  UN POEME CHINOIS

néanmoins s'empêcher de déplorer le génie envahisseur
et destructeur des nations occidentales, qui s'implanten*
partout et anéantissent tout après elles. Que n'aurions-
nous pas appris des anciens rapports de la Chine avec l'A-
mérique, si les historiens Mexicains et Péruviens avaient
eu le temps de nous transmettre leurs origines?
   Je dirai peu de chose du langage figuré du Li-sao,dont
la traduction littérale est impossible, car le génie litté-
raire chinois a pour trait caractéristique de laisser régner
un certain vague obscur, en quelque sorte impénétrable,
que l'esprit du lecteur, faiblement éclairé par des tableaux
esquissés à peine doit chercher à percer. En veut-on un
exemple ?
   Le titre du Li-sao signifie Chants de lamentations; mais,
dans le langage figuré du poème, les Li-sao ou plantes de
Li sont des végétaux aromatiques,parfumés, emblèmes de
toutes les vertus, ornements des sages, tandis que les her-
bes de mauvaise qualité, à odeurs fétides et repoussantes,
les Tsé, les Tou et la Tché, servent à symboliser les dé-
fauts et les vices des flatteurs et des courtisans éhontés,
qui remplissent les palais.
   Cette allusion est d'autant plus sensible, en lisant le
Li'Sao, que le poète en fait un usage presque continuel,
en souvenir de sa propre histoire, dont il fait la description
figurée. A propos des princes de l'Antiquité, qui atteigni-
rent la perfection par excellence, il dit: «• Que tous les
parfums, c'est à dire tous les sages furent avec eux :
c'étaient Yu Tang et Wen-Wang, les deux premiers,
glorieux fondateurs des dynasties Hia et Shang (2.205 à
 1766, A. E. ), et le troisième, fils de Wou-Wang, fonda-
teur de celle des Tchéou ( \ .122, A. E. ), qui tous trois,
surent attirer auprès d'eux les philosophes, les sages, les
lettrés, les hommes les plus éminents de leur temps. »