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                          BIBLIOGRAPHIE.                        303

couleurs ; qu'elle nous donne, comme la peinture, une repré-
sentation exacte des réalités. Cette idée est juste en elle-même.
Mais si l'on se reporte au texte d'Horace, on verra qu'il dit tout
autre chose. Le voilà avec la vraie ponctuation :
         Ut pictura poçsis: erit quse, si propius stes,.
         Te capiat magis ; et quaedam, si longius abstes ;
         Etec amat obseurum, volet hsec sub luce vlderi.

    C'est-à-dire qu'il en est des poésies comme des tableaux, dont
  quelques-uns veulent être vus de loin, les autres examinés de
 près, et, comme on dit, à la loupe. Par exemple, les grandes piè-
  ces de la Légende des siècles, de M. Victor Hugo, sont comme des
  décorations de théâtre. Ne les examinez pas de trop près, vous
 y verriez trop de fautes de dessin ou de couleur; à distance elles
 sont d'un grand effet. Au contraire, les petites pièces de M. Sully-
 Prudhomme, comme le Vase brisé, supportent etréclament l'exa-
 men le plus minutieux. C'est de la peinture à la Meissonnier.
    Ce qui ressort de cette solide et curieuse étude, c'est combien
 l'antiquité était loin de nous pour le respect de la vie humaine,
 pour la sollicitude à l'égard de ceux qui souffrent, pour ce sen-
 timent si profondément enraciné dans nos cœurs depuis le chris-
 tianisme, que le soldat blessé n'est plus un ennemi, qu'il n'est
plus qu'un frère. Les poètes anciens nous montrent partout les
prisonniers et les blessés massacrés sans pitié par l'ennemi vain-
queur. Ceux même de l'armée qui triomphe ne sont pas mieux
traités, heureux quand on les achève par compassion en leur
épargnant une longue agonie sur le sillon où ils sont tombés.
 « Nulle part, dit M. Pétrequin, on ne reconnaît une inspiration
de ce sentiment généreux, de cette noble vertu dont le chris-
tianisme est venu doter l'humanité ; je veux parler de la charité
dont le Christ, dans la parabole du Samaritain, a présenté le
type à la fois plein de simplicité et de grandeur. Qu'on ne s'y
trompe pas, c'est de cette parole auguste que procèdent les
grands dévoûments et les véritables progrès accomplis en fait de
philanthropie. C'est pourquoi l'antiquité n'avait rien à comparer
avec nos ambulances modernes. Quoique nous soyons encore