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494                        CHRONIQUE kOCALK.

c'est que les consultations des médecins qui prennent le bateau sont,
parait-il, bien meilleures que celles des praticiens qui descendent de
l'omnibus. Vraiment c'est à donner à réfléchir aux pauvres gens qui habitent
la Croix-Rousse, car enfin, docteur, avouez-le, tous les malades ne peuvent
pas habiter au port Mouton.
   — Nous ne dirons pas que les processions de la Fête-Dieu ont été belles,
ce serait une banalité; mais nous signalerons l'élégance de quelques nou-
veaux reposoirs, entre autres de celui que le public admirait au levant de
Bellecour et qui rappelait, croyons-nous, l'architecture vénitienne si peu
connue à Lyon. On dit que c'est le coup d'essai d'un jeune architecte qui
revient de l'Italie ; nous l'en félicitons, surtout si ce premier pas doit le
conduire dans une voie nouvelle et inexplorée. Son talent nous assure
qu'en nous donnant du nouveau il saura nous donner du beau.
   — Depuis quinze jours on démolit le pont Tilsitt, depuis huit jours on
a dressé d'immenses échafaudages contre le pavillon du palais Saint-Pierre
qu'on va profondément modifier; espérons qu'ils n'y demeureront pas aussi
longtemps que ceux des Cordeliers. La rue de l'Impératrice est maintenant
pavée en pavés plats jusqu'à la hauteur de Saint-Nizier ; ses magasins se
peuplent el s'ouvrent et bientôt elle sera belle entre les plus belles ; le
Grand-Théâtre se dispose à recevoir les statues des Muses qui doivent
couronner sa façade, au nombre de douze comme à Bordeaux, à ce que
suppose un de nos amis ; on achève de placer le groupe des Heures du palais
de la Bourse, le bas port du quai de la Charité se commence, les derniers
débris du vieux cloître des Jacobins disparaissent et l'on travaille à l'ou-
verture qui doit faire communiquer la rue Saint-Dominique avec la rue
des Archers ; mais notre cher chemin de fer de Fourvières , nos rail-way
sur l'alunie , nos wagons dans les airs, allons-nous les voir suspendus ?
être obligé d'aller, sa vie durant, à pied au pavillon Nicolas à travers les
pots cassés de M. Gay, mais ce ne serait pas amusant du tout et rien ne
pourrait nous consoler d'un malheur pareil, pas même le pont en pierres
de taille entre la Croix-Bousse et Loyasse dont il a été question dernière-
ment à Montpellier.
   — L'année théâtrale s'est finie aux Célestins, le 31 mai, par les repré-
sentations régulièrement suivies de M. Geoffroy, elle a recommencé le
2 juin par les débuts de M. Gay, pas celui du passage. Nous aurons peu de
figures nouvelles, tant mieux. L'armée française qui prend chaque soir
Pékin, lutte avec une rare bravoure contre la chaleur. Les décors sont d'une
grande magnificence, l'entrain est superbe, le patriotisme éclate du premier
coup de fusil au dernier et, sublime effort de l'ait dramatique contem-
porain, vingt chevaux galopent bride abattue sur la scène ; on croirait à
un rêve des fumeurs d'opium. Malheureusement dans celte guerre de Chine
il n'y a qu'un Anglais de tué et c'est lui qui accapare tout l'intérêt.
   — Grâce aux chemins de fer, les produits de tous les pays et de toutes
les saisons affluent dans les grandes villes. Depuis un mois, on voit aux
vitrines de nos marchands : des fraises, des melons, des pommes, des
petits pois et des raisins : ces derniers ne sont point conservés, ils appar-
tiennent à la saison prochaine ; bientôt nous aurons des primeurs d'un an
d'avance.
                                                               A. V.

                             Le Directeur-Gérant, Aimé VWGTRWIER.