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                         LYON AVANT 8 9 .                      131

société, n'éprouvait pas contre les ordres privilégiés cette
haine qui, partout ailleurs, la soulevait contre les supériorités
bien plus encore que contre les abus. Sans doute, à Lyon ,
nous verrons, à la tête de la Révolution , des journalistes ,
des médecins, des avocats ; nous y trouverons cette tourbe
impure de procureurs de bas étage, de négociants faillis, de
journalistes dévergondés, de prêtres apostats qui n'a jamais
mérité le nom de peuple et qui n'a pu obtenir un instant
d'autorité qu'en remuant la fange du cœur humain, mais nous
remarquerons en même temps que tous furent, ou des étran-
gers ou des êtres repoussés par leur propre classe, et que, si
la partie la plus intelligente du peuple de Lyon fut toujours
libérale, elle ne devint jamais révolutionnaire.
    Amour de la liberté , horreur de la Révolution , voilà le
sentiment qui domine dans l'histoire de Lyon , depuis le
 moyen âge , celui qui ressortira de l'examen des cahiers
de 89 , et qui me paraît logiquement démontré et expliqué
par le tableau trop imparfait que je viens de tracer de la so-
 ciété lyonnaise sous l'ancien régime. Ce n'était pas un com-
 posé hétérogène d'existences juxla-posées sans être unies, mais
 une réunion d'hommes attachés les uns aux autres par les
 liens les plus naturels et les plus solides, par l'origine, les in-
 térêts et les mœurs. A part les comtes de Lyon, dont la haute
 noblesse et par suite la naissance étrangère formait une classe
 distincte, si l'on peut donner le nom de classe à un conseil com-
 posé de trente-deux personnes, les trois ordres de l'Etat n'en
 constituaient en réalité qu'un seul. Le noble sortait de la bour-
 geoisie, le bourgeois jouissait des mêmes privilèges que le
  noble; le peuple tout entier avait droit de bourgeoisie, le
  négociant, le magistrat, le gentilhomme et l'ouvrier étaient
  souvent membres d'une même famille. En effet, supposons,
 ce qui arrivait assez fréquemment, un ouvrier parvenu à s'éle-
 ver au-dessus du commun et à acquérir une position indé-