page suivante »
UN ENFANT DE CHOEUR. 473 — Je crois, Jeannette, que le voisin t'a donne' de l'absin- the; mon père en boit quelquefois. Viens nous asseoir sous le portique, nous serons à l'abri du vent; nous déjeunerons avec le pain que j'ai dans ma poche. Le jeune couple se perdit dans les ombres. Lorsqu'ils hr- rent près de la porte latérale qui s'ouvrait pour les offices du matin, les deux enfants s'assirent h terre. Le petit garçon lira de sa poche le morceau de pain qu'il avait annoncé, et chacun se mit a mordre sa portion avec l'appétit de son âge. Jeannette avait près de onze ans et son compagnon n'en avait pas encore treize. Quatre heures venaient de oonner. Le bruii répété d'échos en échos sous les voûtes de l'église, fit frissonner les deux enfants; ils jetèrent un coup d'oeil craintif sur la place abandonnnée a la furie de l'ouragan qui s'y déchaînait, et tous deux, par un commun instirtet, se ser- rèrent l'un contre l'autre. Au même instant, une chauve- souris qui avait fait son-nid derrière les saints sculptés qui montent en guirlande le long des ogives, sortit en battant des ailes et en répandant sur les enfants la fine poussière que le temps enlève à la pierre. La peur a besoin de s'étour- dir; Jeannette plus timide parla la première. — Tourquoi le bon Dieu a-t-il fait la nuit et le froid? dit-elle. — Je ne sais pas, répondit l'autre. Puis après un mo- - ment de silence, il reprit : Tu viens si souvent a l'église que tu dois savoir le chant des psaumes. — Je connais tous les airs que tu chantes, reprit Jean- nette. — Eh bien, donc, reprit son compagnon, chantons en- semble. Et sans plus attendre, il entonna un motet célèbre sur ces paroles : Laudate, pueri, Dominum, Laudate nomen Domini.