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DE L'INFINI. 335 l'élan, la puissance de ressort, le bond prodigieux qu'il faut a la raison pour franchir ce qu'il appelle un abîme, et passer du fini a l'infini. « Alors, dit-il en propres termes, vous « sortez du fini, et vous entrez dans l'infini de Dieu. «Voila une déclaration très-positive. Telle est la portée assignée a la méthode dialectique ou à l'induction. Or, comment souscrire à une prétention si évidemment disproportionnée aux moyens de la nature humaine ? Nous ne rechercherons pas si la doctrine du P. Gratry n'a pas quelque ressemblance avec les principes assez obscurs et d'un mysticisme difficile à pénétrer, de la dialectique platonicienne. Ce débat serait a laisser à l'érudition, qu'il menacerait peut- être d'embarrasser autant qu'il profiterait peu à la philo- sophie. C'est en elle-même, et non dans les contestables anté- cédents qu'elle invoque, que la théorie du P. Gratry doit plutôt être examinée. Elle a subi, de la part de M. Saisset, une vive critique dans un article du recueil périodique la Revue des Deux- Mondes. M. Saisset montre parfaitement, à mon avis, que le calcul infinitésimal, dont l'auteur de la nouvelle logique voudrait importer les méthodes en métaphysique, est un moyen de calculer les accroissements ou décroissements infinis de la quantité, de manière a obtenir une approxima- tion qui est à très-peu de chose près la vérité, ou, en d'au- tres termes, de manière à réduire l'erreur à la plus petite somme possible. On conçoit tout le secours que les sciences qui roulent sur la quantité ou la grandeur peuvent tirer de méthodes donnant de si satisfaisantes approximations, et abaissant l'erreur au-dessous de toute limite appréciable. Mais que peut avoir de commun la métaphysique avec ce qui n'est en définitive qu'une détermination des mesures de la quantité ?