page suivante »
332 DE L'INFINI. hypothèses de l'infiniment grand et de l'infiniment petit. Or, de l'infini a Dieu, quelle analogie, quelle similitude, quelle essence pour ainsi dire identique ! Le P. Gratry a été séduit par ce rapprochement. Il a imaginé que le procédé qui servait au calculateur et qui était au demeurant un pro- cédé logique, pouvait se répéter dans la partie de la con- naissance qui s'élevait aux vérités universelles et à Dieu, y porter sa rigueur mathématique, et de la sorte y faire atteindre Dieu réellement comme en géométrie il semblait faire atteindre l'infini. L'attrait de cette conception l'a d'autant plus captivé, que rien n'était plus facile alors que d'expliquer la vision béati- fique, degré»plus avancé dans le procédé conduisant jusqu'à Dieu. Quelle bonne rencontre n'était-ce point pour la théo- logie de se faire ouvrir par la philosophie les portes et d'entrer avec elle de plain-pied dans le surnaturel. Travaillant sur d'aussi engageantes données , le P. Gratry a posé sa théorie de l'induction ; cette théorie , malgré tous les soins mis a-la dépouiller des apparences d'une nouveauté, a causé une grande surprise dans le monde philosophique. Exposons-la en quelques mots. Selon le philosophe-théo- logien, il y a deux mouvements logiques de la raison : le syl- logisme et l'induction ; le syllogisme qui descend du gé- néral au particulier ; l'induction qui monte du particulier au général ; le syllogisme qui procède du même au même ou par voie d'idendité ; l'induction qui procède du même au différent et par voie transcendante. Jusque-là , et sauf le sens spécial attaché au mot de procédé transcendant, ce n'était que l'ancienne doctrine philosophique. Mais voici en quoi l'innovation va se montrer. L'induction, d'après le P. Gratry, a exactement la formule du procédé infinitésimal: passer du fini a l'infini par l'effacement des limites du fini (1). Elle franchit (1) Gratry, Logique, t. 2, p. 170, édit. in-12.