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96                      VISITE A SANT' 0N0FRI0.

 raient pas trouvé des mots aussi modestes et aussi dignes à
la lois ! « Les os du Tasse sont la! » qu'ajouter après un tel
 souvenir et un tel nom ! (1)
    Les murs qui touchent la tombe, le pilier de la chapelle
voisine sont couverts de poésies en toute langue, d'inscrip-
tions tracées au crayon ou gravées dans la pierre par les
visiteurs. Plusieurs sonl signées de noms connus ou célèbres.
Peu a peu cette petite plaque de marbre blanc jauni, les lettres
noires de l'épitaphe s'agrandissent. L'imagination évoque au
dessus comme deux visions rayonnantes : d'un côté la longue
épopée des croisades avec ses héros, et ses héroïnes : l'hermite
Pierre, Tancrède, Godefroi, Renaud, Clorinde, Armide, Her-
minie, la cité sainte et les bannières chevaleresques ; de
l'autre la vie agitée deTorquato, ses persécuteurs, ses amis:
le Duc Alphonse, le Cardinal Gonzague, Eléonore, Manso,
le cachot de Ferrare et les fortunes tardives ; si tardives que
lorsqu'elles vinrent enfin à lui, il ne les voyait plus, tant ses
espérances et ses regards étaient déjà plongés dans l'infini.
   L'église de Sant'Onofrio possède encore quelques tombes
connues : celles d'Alex. Guidi, poète Italien, de Barclay, l'au-
teur de l'Argenis, et du célèbre polyglotte le cardinal Mezzof-
fante ; mais on ne peut y prononcer qu'un nom humain :
Torquato Tasso.
   Près de cet étroit morceau de marbre sur lequel posaient
à peine mes deux genoux, je méditai quelques instants la
vanité de la gloire et de quel prix se paie le génie ! Le génie

   (I) Suard qualifie l'épilaphc du Tasse de «très-longue » et « d'un style
élégant. » Longue ! il ne me le semble pas ; élégante ! elle est plus ou moins
que cela ; mais toute sa notice sur le Tasse est de cette intelligence et de
cette vérité. N'établit-il pas un parallèle sérieux entre le poète des croisades,
l'amant fidèle et délicat d'Eléonore, l'humble et fervent chrétien de Sant'
Onofrio, et J..I. Rousseau, l'orgueilleux, le cynique impur, le Déiste !!! 0
XVIII» siècle!..