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00 CRITIQUE LITTÉRAIRE. hardi ou plus persévérant, habile à employer ses richesses nouvelles ; marchent-ils dans des voies déjà tracées, leurs œuvres, échos d'œuvres plus grandes, font peuser à celles-ci : c'est un mérite sans doute, mais je ne vois poinl d'auteur assez modeste pour s'en contenter. Quelquefois cependant ces plumes inconstantes Qui, sans se satisfaire, effleurent toutes choses et semblent, dans leur mille détours, se dérober à la gloire qu'elles cherchent, y atteignent par quelque qualité supé- rieure, n'appartenant précisément à aucun des genres dans lesquels ils se sont exercés, mais qui convient à tous et les embellit tous: tel a été le sort de Charles Nodier. En effet, ce nom si répété, si célébré parmi les littérateurs, ne réveille aucun souvenir distinct, ne fait songer à aucune spécialité; ce n est ni un romancier, ni un historien, ni un poète, et pourtant il a fait des poésies, publié de charmantes Nouvelles, écrit des Souvenirs de Jeunesse, qui pourraient passer pour de l'histoire, s'ils ne renfermaient beaucoup de roman, et pour des romans, s'ils ne s'y trouvaient un peu d'histoire; précisément pour avoir fait un peu de toutes ce» choses-là , il n'a pris ses titres et ses grades dans aucune. Nous sommes bien loin de vouloir dire cependant que la ré- putation de « ce riche, aimable et insaisissable polygraphe » est usurpée; mais il a assuré l'existence de ses oeuvres par ces qualités dont nous parlions tout à l'heure, par les orne- ments d'un style enchanteur et le secours d'un autre talent, dont une critique sévère ne lui tenait pas assez de compte, il y a peu de temps, l'art délicieux et rare de conter. En abordant la multitude d'œuvres diverses, de travaux dif- férents ou opposés échappés à celte plume féconde, la pre- mière difficulté que l'on rencontre est celle de dire par où l'auteur excelle, par quel signe il se distingue de tout autre