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                   REVERIES D'UN SONGE-CREUX                437

                              *»
   La littérature, c'est la femme ; elle conserve le patrimoine
traditionnel de l'humanité, et traite les idées qui sont de
tous les temps et de tous les lieux.
   La science, c'est l'homme qui innove, progresse et ose.
                               *
                              **
   La lecture c'est l'oubli, comme l'alcool, mais cette
ivresse, quelque noble qu'elle soit, a ses dangers comme
l'autre. A la longue, elle énerve l'esprit et affaiblit la spon-
tanéité.


   Un des défauts de l'éducation classique, c'est de donner
comme idéal à la jeunesse cette gloire excessive, désor-
donnée, surhumaine des quatre ou cinq grands prodiges de
chaque siècle, et non cet honneur modeste, mais plus
sublime peut-être au point de vue moral, de l'honnête
homme obscur, désintéressé, qui accomplit patiemment et
pleinement sa tâche.


   En face de certains styles qui visent à la bizarrerie à
défaut de l'originalité, comme celui de Z. ou de L., j'ai tou-
jours envie de dire : de grâce, écrivez d'abord comme tout
le monde, et puis vous écrirez mieux que tout le monde,
si vous pouvez.
                               *

  Un homme de goût ne cherche pas plus à se faire remar-
quer par la bizarrerie de son style que par la bizarrerie de
son costume.

     N° 6. — Juin 1891.                                30