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302                PROMENADE AU SALON

la Meuse, si harmonieuse dans sa simplicité, si fraîche à
perte de vue ; et terminons cette revue des tableaux de
genre par la Chimère (435), de MUe Guyon, et la
Prière (275), de M. Delaunay.
   La première, tous les visiteurs lui ont consacré une
halte de quelques instants au moins. Une chimère, indiquée
par de vagues traits, à peine visibles dans l'ombre, souffle
on ne sait quoi de mystérieux à l'oreille d'une femme.
Celle-ci, la fièvre dans le regard et dans le geste, écoute ou
combat ? Bien fin qui répondra. La femme accoudée est
tracée d'une main virile, la peinture est solide, et le vert
aux reflets changeants de la robe ajoute à l'ensemble
quelque chose de savamment diabolique.
   Ailleurs est l'esprit de la jeune femme, de M. Delaunay,
revêtue de bure et portant le voile des carmélites, une
Å“uvre de dimension si modeste que plus d'un passe sans
s'y arrêter. Je ne sache pas cependant de toile qui, mieux
que celle-là mérite le nom de grande peinture, ni de coloris
plus harmonieux, dans sa tonalité forcément sombre et
éteinte.
   Le paysage et la fleur comptent à Lyon chacun une
demi-douzaine de praticiens de valeur, quelques bonnes
médiocrités et plusieurs centaines d'aspirants ridicules, de
l'un et l'autre sexe.
   « Un arbre, ce n'est pas comme une figure, me disait un
de ces faiseurs de cinquième ordre ; un arbre peut n'être
pas ressemblant et cependant être roujours un arbre. »
L'admirable raisonnement, et comme on sent bien que ce
monsieur n'a jamais su voir un arbre et se pénétrer de sa
physionomie propre !
   M. Appian père reste le paysagiste par excellence, mais
je m'entends : à condition de ne pas quitter le fusain. Le