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PROMENADE AU SALON 29I pour entrer tout de suite dans mon sujet, et laissant de côté la sculpture, je ne vois pas au Salon lyonnais quatre tableaux pour lesquels je serais jalouse d'avoir servi de modèle. Et encore, les toiles que j'incline à mettre hors de pair, il n'est pas sûr qu'elles soient toutes d'une main masculine. Voilà , n'est-ce pas ? une inquiétante disposition d'es- prit pour une promenade au Salon. Rassurez-vous. Une fois cette déclaration de principes faite, je redeviens calme comme un expert et impartiale comme un juge. La première impression qui vous saisit, en entrant au Salon, c'est une douce impression de médiocrité sereine, au milieu de laquelle rien ne détonne. La seconde, c'est le caractère tout de famille que présente l'exposition. Un des principaux griefs articulés contre l'ancienne Société des Amis des Arts, était l'admission des artistes de Paris et de l'étranger en trop grand nombre. Sur ce point, les Lyonnais ont eu gain de cause, et il faut chercher main- tenant les toiles signées d'un nom parisien, belge ou genevois : elles sont rares, généralement petites et quel- quefois médiocres. Un autre grief, c'était l'admission trop facile des femmes, des « petites demoiselles », comme disaient les mécon- tents. Oh ! pour cela, la nouvelle Société a fait déborder la mesure ! Certain critique avait relevé soixante-dix noms féminins dans le livret de 1885 ; il peut recommencer son pointage cette année : il en trouvera cent vingt. Et c'est tant mieux ! car si on enlevait les toiles des petites demoi- selles, la cimaise serait tout de suite dégarnie, et je me demande par quoi on les remplacerait. Quant au trésorier de la Société, demandez-lui ce qu'il penserait de cette suppression ?