Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
208                      LES FUNÉRAILLES DE

   De plus hautes ambitions ont traversé un moment la pensée de
notre collègue. Pourquoi les nier ? Si ses aspirations n'ont pas été cou-
ronnées de succès, elles ont pourtant occupé l'opinion publique. D'autres
combinaisons, pour me servir de l'expression tombée des lèvres qui
viennent de se glacer, d'autres combinaisons l'emportèrent. C'est égal,
la candidature n'avait pas passé inaperçue et il y a des tentatives avor-
tées qui valent mieux que des triomphes dus aux grandeurs officielles.
   D'ailleurs, il n'y a pas eu d'échec, la retraite a été prématurée. Sou-
lary n'a eu qu'un tort, celui de brûler trop vite ses vaisseaux ; il
n'avait qu'à attendre ! Sa place était vraiment à l'Académie française,
où il comptait de nombreux admirateurs. Et notre plus haut institut
vient de s'honorer en décernanr à notre poète le prix Vitet, dernière
consolation apportée au chevet d'un mourant.
   Saluons cette ombre qui a passé en laissant une trace lumineuse, ce
profil élégant et fier, si merveilleusement encadré de cheveux blancs,
qui a inspiré le peintre et le sculpteur, comme il aurait inspiré un
médailleur italien du xvi« siècle. Ah ! comme il était de bonne race, ce
penseur, cet artiste expert en fine ciselure. Mais il y avait en lui plus
que l'art ingénieux de l'orfèvre, il y avait la sensibilité discrète, l'émo-
tion contenue et vraie : Muîta inpaucis. Messieurs, inclinez-vous devant
cette tombe, c'est celle d'un Lyonnais digne de mémoire ; l'avenir
dira :
                Due toujours sa palme tardive
                Croît plus telle au pied d'un cercueil.


                 DISCOURS DE M. CAMILLE ROY


         MAÎTRE VÉNÉRÉ, CHER SOULARV,


   C'est au nom de l'amitié dont vous m'avez honoré, c'est aussi au
nom de cette immense légion de jeunes hommes que vous avez con-
duits vers la Muse, c'est au nom de tous ceux que vous avez faits
poètes, et dont l'esprit est présent à la douloureuse cérémonie de vos
funérailles, que je viens vous dire le suprême adieu. Je n'ai pas voulu
songer s'ils n'en auraient pas préféré un plus digne, un plus éloquent,
pour témoigner de leur amour et de leurs regrets ; j'ai cédé à cette voix
intérieure qui me commandait le pieux devoir, que je viens accomplir
 pour eux et pour moi-même.