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436 HISTOIRE D'UNE PENDULE aisément son parti de nos malheurs, mais y avait même trouvé un sujet de divertissement : c'était Pierre Lirchu. Le mouvement de l'arrivée des soldats prussiens, le piéti- nement des chevaux, le son des trompettes, le cliquetis des grands sabres traînant sûr le pavé aigu du village, tout cela le charmait, l'enchantait. Pour lui, plus de ces moments, si rares cependant, qu'il passait auparavant à l'école; plus de ces petits travaux auxquels il se livrait de temps à autre pour apporter à sa mère les quelques sous qui devaient leur procurer une maigre subsistance. Il était constamment auprès des ennemis, leur rendant de menus services, faisant des cabrioles et des grimaces dont ils riaient à large bouche et recevant sans doute en récompense quelques morceaux de leur^ard infect dont il se régalait, tandis que sa mère, dans sa misérable demeure, endurait la faim et le froid ; sans compter qu'en le cherchant longtemps un soir, par une âpre gelée, elle avait gagné un rhume tel qu'elle toussait à se rompre la poitrine tout le long du jour et la nuit en- tière. Vous comprenez que lout le village était indigné de la conduite de Pierre Lirchu et que les épithètes de gibier de potence, de mécréant, d'espion, sifflaient à ses oreilles dru comme grêle ; mais lui n'en tenait aucun compte, et faisait à ses insulteurs soit la roue, soit ce geste peu gracieux où la main et le nez jouent simulta- nément un rôle. Par une de ces journées, trop nombreuses en ce fatal hiver, où la neige tombait à gros flocons, où, tristement assise auprès d'un feu de veuve, je reprisais quelques objets de lingerie en rêvaut au passé, si doux en compa- raison du présent et de l'avenir, j'entendis des huées, des cris. Hélas ! les querelles dans notre village n'étaient pas