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TOUSSAINT DECHAZELLE 363 associés. Mais il ne tarda pas à savoir que ces messieurs les commissionnaires allemands avaient imaginé de cou- per les sous-poches pour les vendre à part fort cher, comme objets de curiosité, ce qui ne les empêchait pas de vendre après très avantageusement encore le reste de l'étoffe. En vérité, les acheteurs allemands n'avaient pas mauvais goût, car les fabricants de nos jours ont pu souvent admirer et étudier, non sans profit, ces petits chefs d'œuvre de fabrique. La réputation de Dechazelle à cette époque devint telle qu'on ne l'appelait plus que le Flamand des étoffes de soie, le Raphaël de la fabrique lyonnaise. Le baron de Gérambe, homme fort important sur la place de Lyon, était l'un de ses plus fervents admirateurs. Il aurait voulu pouvoir absorber à lui seul tous les produits mar- qués au cachet du génie de notre jeune fabricant. — Prenez, lui disait le baron, la soie, l'or et l'argent à pleines mains et créez avec cela tout ce que votre imagi- nation pourra inventer, je le retiens à l'avance. M. de Gérambe était autorisé à tenir un pareil langage, car il était à cette époque chargé exclusivement des ameublements de la cour de Russie. Non seulement ce puissant empire, mais l'Allemagne, la Pologne, l'Orient devinrent les tributaires du jeune Dechazelle. Sa réputation, et avec elle celle de sa ville natale, devint universelle. Elle s'étendit bien au delà des bornes du monde industriel et marchand. En effet, son goût pour les arts ne se restreignit pas aux compositions destinées à la fabrique. On conserve encore de lui des toiles d'un mérite exceptionnel. Tous ceux qui ont visité l'année dernière l'Exposition rétros- pective, ont pu admirer parmi les quelques chefs d'œuvre