page suivante »
444 SAINT-SAUVEUR encore en beaucoup d'endroits les inimitables arabesques. Ces foires préoccupaient le peuple longtemps à l'avance et tenaient une large place dans ses habitudes et dans sa t i e . Le jeune homme venait acheter là les habits de noce de sa fiancée ; l'habitant des montagnes y faisait ses pro- visions; les nobles châtelaines, les chevaliers y venaient aussi, car marchands de toute sorte s'y rencontraient avec épiceries du Languedoc, fins draps du nord, soieries lyon- naises et florentines, blondes et dentelles de la Chaise- Dieu et des Chases, reliquaires de bois ou de cuivre doré, crucifix d'émail de Limoges, que le campagnard achetait pour un ang'elet d'arg-ent ou quelques oboles de cuivre et qu'il suspendait ensuite pieusement aux rideaux de serge de son lit. Les g-ens de tous pays y venaient vendre che- vaux et vaches, taureaux, porcs et brebis; on y trouvait de bonnes armes, voire môme de belles armures, de riches et superbes harnachements pour ha^uenées et palefrois. Chaque foire se prolongeait pendant deux ou trois jours. Nul ne repartait sans avoir visité les reliques de saint Robert, dans l'ég-lise du prieuré, et sans avoir laissé tomber une piécette dans le chaperon du pauvre mendiant accroupi sur le seuil de la chapelle. Les foires, depuis les nouveaux modes de communica- tion dont dispose le xix e siècle, ont singulièrement perdu de leur importance. La plupart des lieux où elles se tien- nent encore ne sont plus, comme autrefois, des centres commerciaux, bien qu'ils soient toujours, à cause de leur situation, des entrepôts où se vendent et s'achètent les productions du pays. Les marchands n'y viennent plus comme jadis pour régler leurs comptes, liquider leurs créances et leurs dettes ; mais les gens de- la campagne ont gardé l'habitude de s'y rendre pour écouler leurs pro- duits, selon les besoins locaux, et à " ce point de vue