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294                       THIERRIAT

   Cet enfant était Augustin Thierriat, qui devait devenir
l'un des représentants de cette forte génération d'artistes,
nés avant le siècle, qui ont honoré Lyon par leur talent,
dont cette ville est justement fière, et dont le dernier sur-
vivant, qui est entré, le 11 mars 1876, dans sa quatre-
vingt-dixième année, est le très-honorable M. Chenavard,
l'architecte de notre Grand-Théâtre, beau monument, dont
la suave décoration intérieure a été remplacée par du clin-
quant, monument qui gagnerait en élégance à être dé-
gagé des rues qui l'enserrent, et dont les piliers devraient
être garnis de quelques légers bas-reliefs pour en atténuer
la simplicité. M. Chenavard fut l'ami et le collègue de
Thierriat à l'école de Lyon et, chose plaisante, son con-
disciple et son premier élève, car ils allaient ensemble
apprendre à lire chez le même maître, place des Carmes,
et Thierriat, âgé de sept ou huit ans, prêtait des images
à son ami, lui faisait copier des moutons, de belles vaches,
et corrigeait son travail.
* Ce maître d'école était un M. Juge, ho»me brutal, qui
frappait les enfants pour la moindre faute, et leur sanglait
les jambes avec une cravache, dont chaque coup laissait
une trace. Combien les leçons de Thierriat à Chenavard
valurent au jeune professeur de cruelles corrections !
   Augustin Thierriat suppliait donc la sainte Vierge de
transformer tous les jours en jeudis, pour échapper à son
bourreau, et rentrait tous les soirs chez son oncle et tuteur,
Augustin Thierriat, le corps meurtri de coups. Il se jetait
alors dans les bras de la domestique qui l'avait vu naître,
s'était attachée à lui et l'entourait de soins et de caresses.
Tous les élèves de mon père l'ont bien connue dans sa
vieillesse ; mais, parmi les rares survivants de cette épo-
que, qui peuvent rendre témoignage en sa faveur, je ne
vois guère que MM. Béraud, notre habile fabricant