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370                      THIERRIAT

 avait en horreur ! De ces excursions dans* la campagne
lyonnaise, dans Saône-et-Loire, dans l'Ardèche, dans le
 Midi, sa mémoire très-fidèle avait conservé une foule de
souvenirs amusants, des mots de paysans, des rencontres
dont il savait faire le récit d'une manière spirituelle,
jamais triviale. Biard, Duclaux, Trimolet, Genod,lesFlan-
drin, Fonville et Bonnefond savaient raconter et présenter
un fait par son côté pittoresque. Leurs récits d'une variété
infinie rempliraient des volumes ; je les ai entendu raconter,
dans mon enfance, les histoires les plus drolatiques. Les
bornes de cette notice ne permettent pas de les reproduire
toutes. J'en citerai cependant quelques-unes qui caracté-
risent le tempérament de l'artiste.
   Ces exercices au grand air, ces marches forcées, ces
excursions pédestres et lointaines, étaient un régime
nécessaire à son tempérament, à sa santé. Moins fort
que Genod et que Jacomin, les deux hercules de l'école,
il était aussi leste que le premier qui aurait pu défier un
acrobate. A cette souplesse il joignait le sang-froid. ,
C'est ainsi que dans une excursion au lac du Bourget avec
Bonnefond, il lui sauva la vie. Ils parcouraient les mon-
tagnes de la Savoie, la Dent du Chat et autres sites pit-
toresques. Bonnefond avait mal fixé sa chaise à proximité
d'un précipice, et dans un mouvement malheureux se
renverse, roule lourdement et arrive sur Thierriat placé
au dessous de lui. Prompt comme la pensée, Thierriat
se redresse, plante obliquement son bâton ferré dans la
mince couche de terre qui recouvre la roche, se campe
solidement, attend son ami de pied ferme et l'arrête au
bord du précipice.
   Une autre fois pour reproduire à l'aquarelle un beau
vitrail de l'église de Brou, il avait placé son pliant sur
 une mince corniche à près de cinq mètres au-dessus du