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216 VICTOR DE LAPRADE Il semble que les vieux soient seuls h craindre pour la beauté sans dot. La règle de trois gouverne la maison, et la jeunesse n'a plus d'autre religion que celle du doit et de l'avoir. Bienheureux avenir ! quel siècle se prépare De sage liberté, d'honneur, de fierté rare, Quand ces petits Messieurs seront des hommes faits, Lorsque nous les aurons, nous vieillards, pour préfets ! Comme tous ces beaux fils porteront la livrée, Pour peu qu'un maître habile avec art l'ait dorée ! (Jeunes fous et jeunes sages.) Il est vrai, ce temps est aux Césars, il n'est pas aux citoyens , et tout ce qui survit du passé de la pairie s'écroule sous la pioche des parvenus. Tombez, vieilles maisons et vieilles mœurs ! Il faut que l'oubli se répande, avec les ruines, sur le sol natal, pour que la conquête en soit plus facile au césarisme. Rien n'appartient plus à personne. Déménagez ! dites pour jamais adieu a la maison de votre père ! La raison d'État l'exige, ainsi que l'intérêt... du valet de César. Comment administrer du fond d'une masure? Au luxe d'un consul son talent se mesure. Sitôt qu'on a souci de se rendre immortel, Pour agrandir son âme on accroît son hôtel. On abat le voisin. — Rangeons-nous et silence ! Place au vieux Jacobin qui devient Excellence .' On peut à chaque pas, dans ces vieilles maisons, Se heurter nez à nez avec ses trahisons. On n'aime pas à voir, ex-libéral austère, Son ancien club louchant près de son ministère, Et du haut d'un balcon d'or à quatre piliers Le coin de rue où l'on décrotta les souliers. Voila pourquoi la France est livrée au marteau démolis- seur ; voilà pourquoi églises, châteaux, cloîtres, remparts,