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                   VICTOR DE LAPRADE
             ET SON ŒUVRE POÉTIQUE



                            (SUITE ET FIN*)




                            IURMODIUS.

     Harmodius ne peut avoir aucune prétention de passer
 pour une tragédie moderne, et il n'était pas nécessaire que
 l'auteur nous en avertît dans sa préface. C'est un poème,
 plus qu'un drame, dont il n'a ni les incidents, ni l'intérêt.
 C'est, pour me servir d'une comparaison que je crois juste
 et qui ne laisse pas d'être à la louange de l'œuvre, un bas-
 relief en marbre de Paros sculpté sur les murs du Parthé-
 non. Les personnages et l'action en ont en quelque sorte
l'élégante mais froide immobilité. Impossible au théâtre, h
 cause de ce défaut de péripéties et de mouvement, Harmodius
n'aurait pas même, pour émouvoir le spectateur, cette puis-
sance invisible qui plane sur la tragédie grecque : la fata-
lité, le destin. Hipparque, pour un tyran qui se sent trahi;
Simonide, pour un poète courtisan qui -se voit méprisé ;
Harmodius et Aristogiton, pour de jeunes conspirateurs,
montrent une impassibilité vraiment olympienne. Seule, la
sœur d'un des deux conjurés, quoiqu'elle dise bien toujours
la même chose, (il est vrai que c'est une femme,) Ismène
prête à son rôle de l'attendrissement et de la vie, et le lec-



  (*) Voir la livraison d'août 1875.