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'I/O sur notre Faculté des Lettres ; c'est la matière la plus élevée que puisse aborder la philosophie. L'histoire des religions est l'histoire par excellence de l'esprit humain; c'est l'analyse des arts et de l'his- toire faite à leur source ; c'est le tableau de l'idéal et du réel pris du point même où ils se rencontrent. C'est la double action du monde visible et du monde inconnu sur l'homme, et la réaction de l'âme sur ces deux puissances qui l'étreignent, étudiées dans leurs effets les plus intimes et les plus universels. Le choix même de ce sujet pour un cours de littérature est le fait d'une grande puissance intellectuelle, il a été heureusement inspiré à celui de nos écrivains qui est placé au point de vue le plus favorable pour le traiter; nous espérons qu'il en sortira un des livres remarquables de notre époque. L'histoire des religions est un sujet neuf, tout-à -fait neuf, malgré ce qu'on pour- rait croire au premier abord. Deux espèces d'écrits ont été faits sur sur les religions, des diatribes où elles ont toutes été également at- taquées comme l'œuvre combinée do la crainte et de lafourberie, des apologies où un culte, se posant comme seul vrai, renvoie à chacun des autres le reproche de mensonge et d'absurdité que quelques hom- mes, usurpant le nom de philosophes, ont fait peser sur toutes les manifestations de la pensée religieuse. A travers ce mouvement d'at- taque et de défense, l'histoire des religions est restée à faire ; elle demandait une époque dégagée de haine et d'amour comme la nôtre, et, dans cette époque, un écrivain profondément doué du sens his- torique, prompt à se pénétrer de l'esprit des temps et des lieux, rem- pli de cet instinct synthétique qui démêle l'immuable et l'universel dans ce qu'il y a do plus relatif et de plus passager, un homme, en- fin, qui tint un compte égal de la raison individuelle et de la raison commune, et qui eut assez d'impartialité critique pour suivre, à travers le labyrinthe des traditions diverses, la grande tradition de l'humanité. Ces facultés du philosophe et du poète, personne ne sera tenté de les contester à M. Quinet; tous ceux qui ont lu et com- pris ses beaux ouvrages assez pour se faire une idée juste de sa per- sonnalité littéraire penseront avec nous qu'il est dans les conditions les meilleures pour écrire une histoire des religions. Nous tiendrons les lecteurs de la Revue au courant de ce cours que Paris nous envie, qui marquera profondément sa trace dans notre ville.