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 par la confidence de son enfant, il veut briser l'engagement
 qui le lie ; car , quitter la France , c'est consentir au déshon-
 neur d'Anna. L'industriel veut chercher Élie et parer à
l'opprobre : Anna ne lui a-t-elle pas dit qu'elle était perdue?
Alors se passa une scène de violence que l'emportement du
malheur pouvait seul excuser : impuissant par la pitié, Seve-
rin descend à la m e n a c e , et brandissant Gaillot au-dessus
du torrent, il se laisse aller à l'idée de l'y précipiter. Les cris
du banquier renversent ce projet. Severin va débattre son
honneur avec la justice , et le verdict d'acquittement d'un
juri ne le fait libre que pour assister à d'autres catastrophes.
    Hélas! combien tout est changé pour cet h o m m e ! L'usine
 peut d'un jour à l'autre être revendiquée par Gaillot, et la
pauvre Anna se meurt dans une lente agonie. Élie ne paraît
 plus; Élie n'a pas écrit. Ce que Severin avait redouté ne tarde
 pas d'avoir lieu : une sentence à la main, les sbires de la loi se
 présentent, et l'usine se vide, et Severin emporte dans ses bras
le corps mourant de sa fille. Quelle main viendra donc à leur
secours? Voyez là-bas ce coursier qui vole sur la plaine : il
apporte Élie, Élie que l'inquiétude dévore, Élie, qu'une indis-
crétion de Dubois a prévenu du danger d'Anna. Oh! mainte-
nant ils iront ensemble frapper à la porte d'une humble chau-
m i è r e ; ils s'écarteront de Gaillot. Mais cette fois encore le
banquier ne les laisse pas dans leur paix : que va-t-il donc leur
dire? La séduction découle de sa bouche. Il les caresse ; donc
il a besoin d'eux. « Je consens au mariage d'Élie et de votre fille,
dit Gaillot àl'induslriel ; vous reprendrez vous-même votre usine,
mais laissez-moile temps de liquider vos comptes; retardons
tout jusqu'alors. » Ce retour subit peut surprendre ; mais il
était évident que Gaillot n'était rien sans Élie , et les malheu-
reux se confièrent à l'espérance; la durée de celle-ci fut bien
courte. Le docteur Dubois la détruisit d'un m o t , et Severin
comprit enfin la pensée de Gaillot : Anna la poitrinaire devait
périr au retour du printemps.
   Certes ce fut une torture bien lente pour le vieillard, que