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ET SA FAMILLE 267 son orgueil et il ajouta bravement cette affaire à toutes les campagnes de sa carrière militaire. Et la courtisanerie était si grande alors que les bourgeois de Lyon, échevins en tête, n'eurent pas assez d'encens pour le brûler en face de leur gouverneur adoré. Cependant, la nouvelle de la maladie du vieux roi vint arracher le maréchal à sa retraite. Il osa reparaître à la Cour et le zèle de Mme de Maintenon lui fit obtenir un bon accueil. Il fut même nommé gouverneur du petit Dauphin, tant on avait oublié nos désastres, et fit accepter l'évêque de Fréjus, Fleury, comme précepteur. Un revirement eut lieu alors en sa faveur ; il intrigua, noua des alliances et se trouva ou se crut plus puissant que jamais. Après la mort de Louis XIV, appuyé par son parti et soutenu par l'affection du petit roi, il s'empressa de contre- carrer le régent dans les choses les plus futiles, comme dans les plus sérieuses. Il poussa d'ailleurs la sottise jusqu'à ses limites les plus reculées, en adulant son pupille jusqu'à la bassesse, en avilissant ses instincts au lieu de les élever, en courbant autour de lui toutes les têtes et tous les caractères et en persuadant au pauvre enfant, comme on l'avait déjà dit à son aïeul, que la France entière, hommes et femmes, idées et choses, offices, charges et domaines, étaient sa propriété, son bien, dont il n'avait de compte à rendre à personne. On sait les fruits que cette triste éducation a portés. Un jour, cependant, la patience du régent eut des bornes. Le 13 août 1722, à la suite d'une discussion orageuse, Villeroy fut jeté dans une chaise à porteurs, enlevé, malgré ses cris et sa fureur, descendu par le grand escalier de Ver* sailles, assis entre deux mousquetaires, au fond d'un carrosse à six chevaux qui l'attendait devant les portes de