page suivante »
350 UN MANIFESTE DE L ' É C O L E TRADITIONNELLE juridictionnellement les chrétientés disséminées, depuis le Rhin jusqu'aux Pyrénées. Une telle assertion ruine d'un seul coup tout l'échafau- dage des légendaires ; c'est là son impardonnable défaut, son vice radical. En réponse Mgr Bellet reproche à ces listes d'être insuffisantes pour établir une chronologie : les plus irréprochables, dit-il, peuvent être incomplètes, sans qu l on le sache, et offrir des lacunes ; elles n'apprennent absolument rien sur le nombre d'années, tantôt très longues, tantôt très courtes d'un épiscopat ou d'une vacance. Elles ont été rédi- gées assez tardivement, les moins jeunes vers l'époque carlovingienne; elles reproduisent enfin les dyptiques et ces tablettes, destinées à être lues à la messe, n'étaient pas à l'abri d'omissions, de surcharges ou d'interversions notoires. Le raisonnement, j'en conviens, ou plutôt le réquisitoire, ne se tient pas trop mal debout ; il est bien mené. N'a-t-il pas cependant le grave tort de partir d'une hypothèse et de se continuer avec des peut-être, sans invraisemblance choquante, mais qui ne sont légitimés par aucune preuve réelle. C'est le sophisme par abstraction introduit dans la méthode historique ; il est aisé de l'appliquer à tout, il est assez fort pour ruiner toute certitude. Condamner en bloc sur des chances probables d'erreur est loin d'être un procédé d'une régularité infaillible, et Mgr Bellet embarrasserait autrement son contradicteur, en signalant quelques uns de ces accidents, qu'il énumère avec complaisance et dont la possibilité l'effraie, tandis que leur existence a échappé à ses minutieuses investigations. Pour anéantir la valeur de ces vieux parchemins, déclarés excellents d'autre part, il suffi- rait d'y surprendre quelques-unes des fautes qu'on leur reproche de ne pas exclure nécessairement. Alors, on cesse- rait de les apprécier; on les écarterait immédiatement du