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86 UN PUHCUKSHUK J)K LA PLÉlADK Discours philosophiques, ne tenons-nous pas ici l'un des anneaux de la chaîne que nous essayons de rétablir dans sa continuité ? Nous en saisissons un autre, et le plus impor- tant peut-être, dans ces vers de Du Bellay lui-même : Gentil esprit, ornement de la France, Qui à 'Apollon saintement inspiré, T'es le premier du peuple retiré Loin du chemin tracé par l'ignorance ! Le premier, — vous entendez bien, — c'est d'avoir été le premier qu'ils le louent tous ; et tous d'ailleurs ils font mieux que de l'en louer, ils le suivent ! et de même qu'en effet les Erreurs de Pontus, l'Olive de Du Bellay et les premières Amours de Ronsard ne sont qu'une imitation de la Délie de Scève. C'est qu'aussi bien, j'ai tâché de vous le faire voir, cette Délie n'était comme qui dirait qu'une première épreuve, une épreuve avant la lettre, des principes que les théoriciens de la Pléiade allaient faire prévaloir. Puissent les hellénistes •me pardonner ici mon audace ! Mais ils n'en est pas jusqu'à l'obscurité qui ne me semble avoir je ne sais quoi de pindarique. En tout cas, c'est bien lui, l'auteur de Délie, qui a le premier compris que le lyrisme ne faisait qu'un avec lapoésie personnelle, et c'est bien lui qui l'a prouvé par son exemple. Au lieu d'adopter le sonnet, dont la structure mathématique eût mieux convenu sans doute à la nature de son talent, s'il est resté fidèle au dizain de Marot, il v a su du moins introduire des intentions d'art qui, pour n'avoir pas toujours été suivies d'effet, n'ont pas laissé de servir de guide à ses imitateurs. On n'a d'ailleurs de lui ni « virelais », ni « rondeaux » ni « chants royaux », ni