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                     LE COMPLOT D'ALAGON                  385

 comme commandant pour le roi en Provence, d'Epernon
 embrasse le parti de la Ligue (1595) et Meyrargues
 devient royaliste. C'est du reste l'époque où la Provence
 se soumet, sous la main énergique du duc de Guise, gou-
verneur pour le roi Henri IV.
    Mais revenons à Meyrargues, que la déposition de
 Bruneau avait accablé. Amené une deuxième fois devant
ses juges, il ne persista plus dans son précédent système
 de défense. Il se retrancha, cette fois, derrière les sol-
licitations pressantes dont il aurait été l'objet de la
part des Espagnols, et affirma ne s'être point engagé
avec eux. Ses juges lui répondirent en lui mettant sous
les yeux le papier révélateur échappé à la jarretière de
Bruneau. C'était plus qu'il en fallait, avec les aveux du
secrétaire, pour le perdre sans ressource. La Cour le con-
damna comme criminel de lèse-majesté à la mort des
 traîtres. Ce fut alors qu'Henri IV, fidèle à ses habitudes de
clémence, proposa à ses parents de Guise et au cardinal de
Joyeuse, de commuer sa peine en un exil perpétuel. Ces
derniers n'acceptèrent pas : « Il faut purger la terre de ces
« brigands, répondirent-ils, et nous aimerions mieux le tuer
« nous-mêmes que le voir vivre. » (D'Avrigny).
   Ils n'en eurent pas le souci ; la Cour s'en chargea. Le
 19 décembre, une charrette s'arrêta devant l'échafaud de la
place de Grève; Meyrargues monta les degrés, sa tête
roula sous la hache du bourreau, puis son corps fut écartelé
à quatre chevaux. C'était le châtiment des parricides et de
ceux qui tentaient d'assassiner le roi, père de son peuple.
   Ses restes sanglants furent envoyés à Marseille, exposés
sur les remparts; et sa tête, fixée au bout d'une pique,
demeura longtemps sur la plus haute porte de la ville, triste
image de celui qui avait demandé son élévation aux enne-
        N° s. — Mai 1887.                           25