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362 LES ALIÈNES DEVANT L'OPINION pour démontrer le peu de valeur des accusations d'arbi- traire portées contre la loi de 1838, relativement à la sécurité de la liberté individuelle. L'insuffisance qu'on peut lui reprocher ne saurait résider que dans l'inexécution et non dans la teneur mê ne de ses prescriptions. Les abus existeront toujours, parce qu'ils sont le fait de la nature humaine; il n'y a pas de législation possible pour les pré- venir. Personne n'est exempt de défauts ou de vices, car personne n'est exempt de passions. La légèreté, l'insou- ciance, l'abaissement du niveau intellectuel, chez les uns; et chez d'autres, l'égoïsme, la cupidité, la cruauté même, engendrent des fautes, des délits ou des crimes dont on ne peut rendre les lois responsables, car il est impossible de prévoir toutes les circonstances capables de les faire naître et de leur donner cours. Il est même dangereux pour une loi de s'égarer dans les détails, car son silence sur des particularités imprévues crée des exceptions. Presque tous les abus ne sont que des attentats au droit commun, qui empruntent leur caractère de gravité à la situation parti- culière et réciproque des délinquants et de leurs victimes; l'application sévère des peines édictées par la loi commune est suffisante pour en opérer la répression. Si bien conçue, cependant, que soit une loi, il est impos- sible qu'elle ne laisse pas subsister des lacunes souvent rela- tives à des détails inaperçus et que le temps révèle par la suite. Les changements opérés dans nos idées et dans nos mœurs par la marche progressive de la civilisation font surgir de nouveaux points de vue et de nouvelles nécessités. Les principes de la morale sont immuables, mais il n'en est pas de même de la moralité et de la conscience publiques ; on ne sent et on n'apprécie pas toujours de même, et ce qui était un crime arrive souvent à r.e plus être qu'une