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LA PESTE A SAINT-GENEST-MALIFAUX 345 ment et à entendre juste. Avec une simplicité, mêlée à certains endroits d'une douce naïveté, il rapporte en témoin véridique, écrivant sans apprêts, consignant ses impres- sions, raisonnant peu, mais avec sagesse, distribuant avec impartialité le blâme ou la louange à ceux qui s'en sont rendus dignes. Cette peinture d'un village important, tel que Saint- Genest-Malifaux, dans le premier quart du xvli e siècle, est pleine d'intérêt et de surprise ; plus d'un en sera vivement étonné, scandalisé peut-être. Elle nous remet sous les yeux la condition et la misère du paysan, ses habitudes et ses préjugés, l'état des mœurs fort loin d'être irréprochables, les sottises des uns, la charité des autres, les terreurs de tous ; après quelques-uns des incidents grotesques ou im- moraux relevés par notre chronique, il nous semble qu'on ne peut mieux connaître la situation du pays et le caractère de ses habitants; à certains moments, on croirait ne par- courir qu'une statistique ou un froid nécrologe, mais là même abondent les renseignements les plus curieux et se glisse tout à coup une piquante réflexion. Il n'est pas jusqu'à la crédulité, quelques-uns même l'ap- pelleront superstition, du vénérable prêtre qui ne soit un trait excellent à recueillir ; sa philosophie accepte volontiers tous les signes auxquels le peuple attachait alors une idée sinistre; mais il n'oublie pas en même temps de voir dans les coups qui frappent sa paroisse désolée le châtiment de fautes et d'excès qu'il déplore ; pour lui, la Providence n'est pas moins présente dans la répression du mal que dans les manifestations de la charité et de l'héroïsme, ins- pirés par la religion. Peut-être trouvera-t-on aussi dans ces pages, trop courtes à notre gré, des expressions peu voilées, des termes vifs,