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                          LUG EN CELTIQUE                            II9

   M. Allmer, avec sa science supérieure, a, en effet, plei-
nement justifié de l'existence de ces documents, mais de là
à 'conclure que lug, en celtique, voulait dire corbeau, il y a
un abîme.
   L'idée des « armes parlantes », par exemple de repré-
senter « Lyon » par un « lion », parce que les deux mots
sonnent de même, est toute moderne ; M. Steyert l'a fort
justement fait remarquer. Pour enfanter le calembour, il
était besoin de notre cerveau tor.tu. Si, parce que l'on
trouve un corbeau sur les monnaies d'Albin, lug voulait
dire corbeau, il faut dire que, parce que l'on trouve un
crocodile sur les monnaies de Nîmes, nem en celtique
signifiait crocodile, et parce que Ton trouve un lion sur
celles de Marseille, que mass voulait dire lion. La ville de
la Louve ne s'appelait pas Lupa; la ville de la Chouette ne
s'appelait pas rXauÇ et Sélinonte, pour avoir un Apollon sur
ses médailles, ne s'appelait pas ÀTCÔW^V.

   Le second argument est celui-ci : Clitophon était mieux
placé que nous pour savoir le celtique. Il nous a transmis
fidèlement (9) le sens de dunum. Pourquoi n'aurait-il pas
transmis exactement celui de lug ?
   L'argument aurait beaucoup de force si Clitophon n'avait
pas eu besoin de son interprétation de lug précisément
pour appuyer sa fable des corbeaux s'envolant au moment
de la fondation de la ville.
   Avec nos habitudes modernes, nous nous faisons difficile-
ment une idée de l'historien au temps de Clitophon. L'his-
torien n'était pas tenu aux conditions d'exactitude dont


  (9) L'exactitude n'est peut-être pas absolue. Dun signifiait forteresse
(Zeuss). L'extension au sens de colline serait moderne.




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