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298                       THIERRIAT

    Singulier rapprochement où l'on serait tenté de voir
 l'action de la Providence, l'un de ceux qui renversèrent
le tyran, fut le conventionnel Legendre. Or, Legendre de
la Nièvre était l'oncle du jeune Thierriat. Il était l'ami de
Tallien et l'ennemi de Robespierre, dont il avait combattu
les théories chez Danton, où Robespierre, avant de guil-
lotiner son ami, dînait quelquefois, en compagnie de
Legendre, de Miot, de Lacroix, de Camille Desmoulins et
de Fabre d'Eglantine. Au 9 thermidor, Legendre entra
le premier dans le cabinet du tribun détrôné, le mit hors
la loi, saisit dans son secrétaire des papiers d'Etat, une
 correspondance secrète avec le comte de Provence
(Louis XVIII), correspondance qu'il garda et qui fut plus
 tard, en 4815, lorsqu'il fuyait proscrit à son tour, la
 cause de sa fin tragique, comme on le verra bientôt.
    Robespierre, exécuté en compagnie de son ami, le
 savetier Simon, le geôlier de l'infortuné Louis XVII,
la France respira ; un régime plus doux remplaça la Terreur,
la confiance reparut et les parents de Thierriat purent
rentrer à Lyon ; mais son père, ruiné, découragé, ne
put résister au chagrin ; il mourut, laissant son fils
orphelin à sept ans.
    Les événements de cette triste époque avaient laissé
dans l'esprit de Thierriat une impression sinistre et pro-
fonde. Ces visites domiciliaires au milieu de la nuit, sa
fidèle domestique emprisonnée, ses parents en fuite, le
bruit du canon, les maisons et même l'Hôtel-Dieu incen-
diés pendant le siège, la bataille du commencement de
septembre 1793, dans la presqu'île Perrache, arrosée du
sang de tant de Lyonnais, la prise de Sainte-Foy, par
Couthon, qui établit son quartier général dans la maison
Pinturel, où les généraux de la République venaient
s'incliner devant le dictateur cul-de-jatte , représentant