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132                LE 2 NOVEMBRE 1875

choisir le.jour même où l'Eglise prie spécialement pour
ses chers défunts. Aussi le premier acte de cette journée,
si féconde en souvenirs, a-t-il été de venir au pied des
autels s'incliner devant Celui qui règne dans les deux,
de qui relèvent tous les empires, auquel il a plu de nous donner
de grandes et de terribles leçons. Mais comment se défendre
d'une profonde tristesse, en pensant que dans ce même
sanctuaire, à cette même place où on priait pour ces jeunes
gens si tôt moissonnés, eux [aussi, chrétiens fermes et
convaincus, s'étaient plus d'une fois agenouillés ? Oui,
c'est bien là qu'ils avaient reçu cet esprit de sagesse et
de force , spiritum consilii et fortitudinis, qui fait les
dévoués et les vaillants. On se rappelait leur noble atti-
 tude, leur front serein, leur regard limpide, leur franc et
 noble visage, toute leur personne enfin qui s'épanouissait
 au souffle de la divine Providence. On les cherchait encore,
 on les appelait, on croyait les revoir près de soi. Vaines
 illusions ! Le catafalque, qui s'élevait au milieu de l'église,
 entouré de lycéens en deuil, redisait à tous l'inexorable
 réalité. Ils n'étaient plus. Ils avaient, suivant le mot des
 livres saints, passé comme l'ombre, velut umbra. Il ne
  restait plus d'eux qu'un souvenir. Encore a-t-il fallu le
  graver sur le marbre, pour le disputer à l'oubli qui n'épar-
  gne rien ici-bas !
     La religion seule a la vertu d'adoucir ces pensées amères.
  En élevant nos regards vers le ciel, en nous montrant
  notre véritable patrie, elle nous dit que ceux que nous
  pleurons nous ont simplement devancés, et qu'ils nous
  attendent. Ne rendît-elle à l'humanité d'autre service que
  de nous arracher au désespoir à l'heure des séparations
  douloureuses, elle devrait être bénie et tenue pour un
  bien inestimable !
     Pénétrée de ces sentiments, la nombreuse assistance a