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37C                         DE LA VJÊR1TÉ.

admettre ou rejeter la tradition par oui ou par non (1), sans la re-
faire avec cet esprit de subtilité, de scepticisme, de tâtonnements,
de doutes, de probabilités, avec cet ensemble de misères scienti-
fiques, d'explications niaises, de peut-être éternels, de fadeurs
bucoliques, qui rendent de pareilles études plus fausses et plus
frivoles que les romans de Monte-Christo et de Rocambole.
    Ceux qui sont dans l'impossibilité de prouver pour renverser,
se contentent d'insinuer pour détruire. Les plus faibles de tous
les sophistes ce sont les insinuateurs ; mais ce n'en sont pas
les moins dangereux, car qui insinue, empoisonne.
   « Il y a une histoire vraie ; il faut la chercher, comme Bossuet,
 dans les traditions patentes de l'humanité, dans ce qui nous est
 parvenu de main en main à travers les âges, dans ce qui a sur-
 vécu de la vérité probable et la plus piobable L'histoire conjec-
 turale peut amuser celui qui l'écrit ou la parcourt, comme un
 jeu de cassetête distrait l'enfant qui ne sait comment tuer le
 temps les jours le pluie. Les historiens conjecturaux peuvent
 être amusants, mais ils sont stériles ; il est surtout rare qu'ils ne
 torturent et ne faussent le peu de vérités historiques qu'ils remuent
 au profit de leur fantaisie.
     Le courage et la logigue n'ont rien de commun. On en croit
 des témoins qui se font tuer, dit Pascal. Pourquoi? Pourquoi
 croire spécialement à leur témoignage ? Je conviens que le sen-
 timent de la vérité donne du courage: mais je nie que courage
  et vérité soient choses semblables. Confondez-les^ et l'erreur vous
 montrera ses martyrs : les musulmans, en effet, meurent pour
  leur foi comme les chrétiens ; les protestants, comme les catho-
 liques. Des épicuriens sont morts non moins généreusement
  que des stoïciens.
     Ne connalt-on pas d'intrépides criminels qui sont morts éner-
  giquement en soutenant leur innocence sur le chevalet, sur le
 feu, enfin sur la roue ? Celui qui meurt pour son Dien prouve
  sa conviction, il ne prouve pas son Dieu.
  (1) Je parle ici en laïque, en penseur ; je renvoie à la théologie ceux
qui veulent s'instruire plus à fond. Tout chrétien ne peut fournir la preuve
que les sophistes en exigent, mais l'Eglise répond pour lui.