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ses? Croyez-vous que ces rubans rouges, ces plaques d'or ou de bronze
 dont vous l'affublez lui empêchent de fermer les yeux sur la misère de
 ceux qui travaillent, et sur le délabrement de sa puissance? Croyez-vous
 qu'ainsi chamarée elle soit plus noble et plus majestueuse? Vous en faites
 une prostituée et rien de plus.
    Allons, c'est assez, il faut commencer; mais, par pitié, permetltez moi
de vous faire grâce du café châtaigne, des chapeaux gibus, des perruques
 à courant d'air, des socques articulés, des savons marbrés, des raille et une
pommades régénératrices et huiles idem, enfin de toute celte chaîne de fu-
tilités dont le besoin s'était fait cependant généralement sentir [style de
 prospectus).
    On a le plus souvent vanté les machines exposées. Beaucoup de per-
 sonnes en parlent avec emphase justement parcequ'elles n'y compren-
 nent rien. Et cependant s'il y avait un progrès à signaler aujourd'hui
 dans les produits de l'industrie, ce ne serait pas à coup sûr dans la
 spécialité des machines; malgré tous les efforts des exposants rien ne peut
 nous faire présumer que nous puissions bientôt aller de pair avec l'Angle-
 terre.
    Nous n'avons guère depuis cinq ans aucune grande découverte mécani-
 que qui ait changé la face de nos industries, riusieurs machines, il est vrai
 ont été perfectionnées jusques dans les moindres détails ; mais ce ne sont
 là que des améliorations.
    Parmi les constructeurs des machines, M. Saulnicr est, à coup sûr, celui
 qui s'est le plus distingué. Il y a une grande intelligence dans toutes les
 combinaisons de ce constructeur. Tous les ajustages sont faits avec une pré-
 cision remarquable, et l'on peut dire à coup sûr que, différent de beaucoup
 d'autres, il fait marcher de front dans ses ateliers la pratique et la science.
    Nous sommes donc moins avancés que l'Angleterre. Nos machines les
plus admirées, celles pour fabriquer le papier continu, le banc à broches
pour le lin de MM. Debergue et Spréafico, l'appareil pour la filature du lin
de M. Schlumberger, le métier à filer le cotou de M. André Kœchlin sont
tirés en partie, sauf quelques modifications de détail, d'une foule de machi-
nes anglaises qui aujourd'hui fonctionnent et sont arrivées chez nos voisins
Ă  un perfectionnement admirable.
    Cependant nous pouvons espérer. Déjà nos mécaniciens élevés à l'école
anglaise se servent dans la pratique de la plupart de ses procédés: et si
nous ne sommes pas inventeurs, nous pouvons nous dire des hommes d'i-
mitation, c'est déjà quelque chose.
    L'ébénisterie est dignement représentée; il y a de beaux meubles. Eu gé-
néral, tous les bois sont travaillés, incrustés, polis, marquetés avec mi
talent digne du XVII siècle. Quelques modèles sont pleins de goût et de
simplicité. Beaucoup d'autres n'ont du mérite que par rapport à l'exécu-
tion, notamment cette table monstre, faite d'une pièce, ce qui ne prouve,
qu'une seule chose, c'est que l'ouvrier a trouvé un plateau assez grand pour la
faire.
    L'orfèvrerie ciselée et émailléc de M.Marrei est une chose merveilleuse.
Il y a parmi les produits de cet exposant une coupe d'un goût si antique
et si pur, qu'on croirait voir une patère pour les libations dérobée au tem-
ple de Jupiter Olympien.
    De grâce, maintenant qu'il me soit permis d'en rester là. J'ai les yeux
fatigués de tout ce que j'ai cru voir, la tête grosse de ce vacarme qui plane
dans l'enceinte comme la poussière sur un grand chemin, l'imagination
tourmentée , harassée , écrasée par la foule, cette espèce de kaléidoscope