page suivante »
DE LÀ FIN DE LA GUERRE DE CENT ANS 249 Quelle terrible disgrâce pour un homme puissant, qui avait si pompeusement annoncé sa victoire ! Sa gloire était tournée en honte, et son assurance de la veille n'allait plus être aux yeux de tous qu'une ridicule forfanterie. Cinq mille hommes de belles troupes qu'il avait venaient de fondre devant une armée (si cela pouvait s'appeler une armée), plus faible d'un tiers pour le moins. Ses soldats, son matériel de guerre, ses places du Dauphiné, il avait tout perdu, tout jusqu'à son grand étendard de soie rouge et noire où il avait fait appliquer un soleil d'or, jusqu'à sa bannière, qu'il aimait tant, aux armes de Châlon, Orange Genève. Seul, abandonné, méconnu, il ne lui restait qu'à s'en aller, lui aussi, comme un simple sire de Rochebaron ou de Thoulongeon, dire une fois de plus à Monsieur de Bourgogne ce qu'il en coûtait d'avoir affaire avec M. le sénéchal de Lyon. Malgré le petit nombre des combattants qui y furent engagés, la journée d'Anthon eut des résultats dont quel- ques historiens seulement ont compris et signalé l'impor- tance : « Si les Français avaient perdu cette bataille », dit M. de Barante, « c'en était fait du Lyonnais, du Dauphiné et même du Languedoc. Charles VII pouvait de cette affaire perdre son royaume. » Dieu ayant fait triompher les armes du Roi, « tout le Midi fut délivré des Bour- guignons (17). » il avait vendu le cheval qui l'avait le mieux servi en divers combats. Le prince évita cette repréhension. Mais, s'étant humilié devant son cheval par une reconnaissance si inconsidérée et si indigne, ne témoigna-t-il pas que l'amour de la vie était en lui bien plus violent que celui de la gloire. » Hist. gên. du Dauphiné, p. 427. (17) Hist. des ducs de Bourgogne, t. III, p. 404. Cf. Paradin. Hist. de Lyon, p. 249.