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90 UN ÉPISODE LYONNAIS Au moment où s'ouvre cette crise suprême dont la France et son roi ne sortiront que s'il plaît à Dieu de les sauver en leur envoyant Jeanne d'Arc, que deviennent nos Lyonnais ? Ne perdent-ils pas courage ? A l'instar de beau- coup de seigneurs qui, à la suite de la bataille de Verneuil, désertèrent momentanément la cause de la France, ne se lassent-ils pas de servir l'infortune ? Non, pas un [instant le patriotisme de nos bourgeois ne se laisse ébranler. Loin de faiblir, il s'élève à la hauteur des circonstances-- Le vendredi, 8e jour de juin 1425, réunis dans la maison de la rue Longue qu'ils viennent d'acquérir pour y instal- ler la municipalité, les élus de la Cité inaugurent ce pre- mier hôtel de ville en renouvelant solennellement leur serment de fidélité à la Couronne. Ils jurent tous « de vivre et mourir à la vraie obéissance le Roy, et tenir le party du Roy tant que lui-même le voudra tenir (16). » Belles paroles ! objectera-t-on peut-être, mais qui, pro- noncées à Lyon, n'ont pas la même valeur que si elles point. Ains lui suscita une aide qu'il a accoutumé d'envoyer quand les affaires sont hors de l'espérance des hommes, « à ce que l'on connaisse que l'extrême secours vient de lui. Et ne se faut esbahir si Dieu eust pitié de ce pouvre roy affligé, auquel la grande vexation et tentation avait tellement enlevé l'esprit en Dieu que se trouvant en ceste destresse, l'on le voyait la nuit se lever de son lict en chemise, et se mettre à genoux, priant Dieu les larmes aux yeux, recongnaissant que le secours et ayde ne luy pouvaient venir d'ailleurs que du Dieu fort et du seigneur des armées qui exalte les humbles et humilie les orgueil- leux. Qui est profitable exemple et considérable mémoire pour les princes sur lesquels la main de Dieu est aggravée. » Guillaume Paradin. Annales de Bourgogne. Lyon, 1566, p. 703. Cf. Du Fresne de Beaucourt, loc. cit., p. 195 et 196. (16) Séance consulaire du 8 juin 1425. Arch. de Lyon, BB, 1, fol. 230 verso.