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412 LES DEUX PLATS D'ÉPDNARDS. Que faire d'une héroïne ainsi changée et d'une amante cou- turée? Tous deux durent renoncer, l'un à ses amours et l'autre à en faire le récit. Paul Rives se fût résigné à nicher encore quelques Cupidons dans les creux de la petite-vérole, mais au sein des coutures! Horreur!! Dans leur désespoir mutuel, de Pernay partit pour un long voyage afin de distraire sa douleur, et Paul Rives, se souve- nant d'an vieux auteur auquel il avait soumis naguère, pour les juger , ses premiers essais littéraires, résolut d'aller lui confier sa mésaventure et de lui demander des sujets de nou- velles ou tout au moins des consolations pour son infortune à n'en pas pouvoir trouver. M. Verbois,que Paul Rives allait consulter,était un homme que des maux et des chagrins également graves avaient en- gagé à se retirer à la campagne;où il passait toute l'année. Né sensible, bon, il avait été la dupe de !ous ses généreux instincts et malheureusement aussi l'esclave de violentes pas- sions qui avaient tyrannisé sa jeunesse et ne l'avaient quitté que dans son âge mûr ; les lettres et la poésie l'avaient accom- pagné dans les phases les plus orageuses de son existence. Elles lui avaient servi dans des moments de Calme à célébrer la nature et la religion, ces deux grandes consolatrices des malheureux, qu'il avait réunies dans ses œuvres comme dans son cœur et qui charmaient la retraite riante et profonde où il s'était volontairementenseveli, recevant les visites d'anciens amis qui partageaient ses goûts et s'intéressaient encore à son sort. Il accueillit Paul Rives avec cordialité. — Hé bien! mon jeune ami, en quoi puis-je vous être secourable ? lui dit-il. Comme tant d'autres, vous vous souvenez de moi alors qu'un obstacle vous arrête ou qu'une contrariété vous abat. Voyons, parlez, et le vieil auteur que vous consultâtes autrefois cher- chera encore, s'il le peut, à *vous être agréable et peut-être utile.