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 monde, ouvrage des hommes seuls, doit participer de la cadu-
 cité et des misères de l'homme, et que, pour les autres, tous
 les événements qui surviennent, heureux ou malheureux,
  contribuent tous au même b u t , opèrent le même mouve-
 ment; et que toutes ces révolutions qui ensanglantent la terre,
 tous ces cadavres de peuples et d'empires, c'est le fumier qui
 sert à féconder les champs de je ne sais quel mystérieux ave-
 nir. — Et cependant que nous montre l'histoire ? Ici, des ca-
 tastrophes heureuses et bonnes; là, des souffrances et des lar-
 mes perdues; ici, des nations anéanties, des civilisations étein-
 tes, des peuples dont il ne reste rien, Babylone, Memphis,
 Carthage ; là, une société nouvelle surgissant des ruines d'une
société mourante, d'effroyables calamités enfantant le bonheur,
 comme la charrue qui déchire pour fertiliser ; la civilisation
américaine s'embarquant sur les vaisseaux qui fuient le des-
 potisme des Stuarls ou la terreur des Indépendants ; la paix
de l'Allemagne sortant du sac de Magdebourg et des désastres
inouis de trente années d'une guerre impitoyable ; la révolu-
tion française, hideuse de terreur et rouge de sang, associant
l'Europe aux conquêtes philosophiques et politiques duXVIIIe
siècle. — Non, non, et il faut qu'on le sache bien, la civilisa-
tion ne s'avance pas par sauts et par bonds, en rompant sans
cesse la chaîne des causes et des résultats.—Fille de la liberté
humaine, elle est changeante et mobile ; fille de la providence
divine , elle est mystérieuse, impénétrable ; bâtissez sur une
telle base l'édifice de vos prédictions. Sans doute l'histoire,
par la variété des choses qu'elle présente à nos yeux, parles
comparaisons quelle provoque, peut et doit inspirer une con-
fiance plus ou moins fondée, en nous instruisant de ce qui s'est
fait, en nous faisant connaître les progrès constatés, elle peut
quelquefois nous initier aux secrets de l'avenir ; mais de là à
l'admission des principes indéfiniment progressifs, il y a un
abîme. Et moi aussi j'ai foi dans le progrès, dans le progrès
possible, raisonnable, moi aussi je suis fier pour mon pays et
pour mon temps de ce que je vois, de ce que j'espère, mais je