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450 dans un cercle fatal, asservie à la loi comme l'esclave au maître. D'autre part, changements, variations continuelles. L'hom- me procède par caprice et par bonds, comme le jeune che- val sans frein dans la plaine. Il fonde des empires, des re- ligions, des législations; l'édifice achevé, il le brise et sur les ruines il en construit un autre, pour le briser et le rem- placer encore. Nul repos, agitation éternelle : il s'en va dans toutes les directions du monde, inquiet comme s'il cherchait un trésor perdu, ici marchant, là se précipitant, un jour cal- me, l'autre furieux et ne pouvant jamais trouver ce qu'il cher- che. Cette étonnante mobilité, loin d'humilier l'homme, at- teste sa liberté et parlant sa dignité. C'est parce que l'hom- me est libre qu'il est roi de l'immuable ; roi souvent pris de vertige comme Saûl ou comme Hamlet, mais roi tout puissant sur ce qui l'environne, quand il sait être tout puis- sant sur lui-même. — Toilà la nature, voilà l'homme. Si l'on y regarde de plus près, le contraste se modifie. Et d'abord tout dans la nature ne porte pas le sceau de la fa- talité. Que de phénomènes se produisent à chaque instant, irrégulièrement, en dehors de la loi : phénomènes chargés par le Monarque du monde d'atlestcr sa liberté, comme les phénomènes réguliers attestent son immutabilité; ( Dieu se manifeste tout entier dans ses œuvres) phénomènes qui se lient admirablement avec nos facultés actives qu'ils éveillent puissamment, tendent, mettent en jeu, et par conséquent perfectionnent. L'homme de son côté n'est pas tout caprice, tout fantaisie; il a aussi sa loi. D'invisibles liens le retiennent : liens fort longs, il est vrai,qu'il peut plier, replier, courber dans tous les sens, accourcir s'il le veut, tendre jusqu'à un certain point mais rompre, jamais. Et si la nature semble aujourd'hui immobile et station- naire, elle ne fut pas toujours de même. La science nous mon- tre notre globe passant par une série de révolutions pour arriver à son état actuel ; série qui n'est pas seulement «ne