page suivante »
488 Or , si les langues sont le premier trésor de l'homme social, quoi de plus curieux et de plus utilement philoso- phique que de remonter à l'origine de leurs éléments cons- titutifs, d'assister à la formation des mots et de saisir, avec le rapport entre le signe et son objet, l'impression que fit cet objet sur le créateur du signe ? Quoi de plus instructif que d'étudier un radical croissant et se multipliant, comme un germe, en mille variétés? Certes, nous ne demandons pas qu'un professeur de lit- térature ancienne aille fouiller dans l'hébreu, le sanskrit ou le celtique pour retrouver une origine perdue 3 mais en se circonscrivant dansles langues de son ressort, il lui reste encore un champ large et fécond à exploiter. Que de mots imitatifs le grec renferme ; que de formes il donne à une même racine pour lui faire signifier toute une famille d'i- dées ! suivre une racine dans toutes ses ramifications à tra- vers la langue grecque, et de là à travers le latin et jusque dans le français, pense-t-on que ce soit là un exercice sans profit et sans intérêt? Quel parti un habile helléniste, com- me M. Démons, pourrait tirer de l'emploi judicieux du di- gamma éolique, l'éolien ayant formé le latin, et le latin étant passé en si grande partie dans notre langue? Nous terminerons-là nos observations sur le cours de lit- térature ancienne. C'était pour nous un devoir de rendre hommage à la science et aux efforts consciencieux de M. Démons; ce devoir nous a été doux à remplir; mais c'était pour nous un autre devoir de dire ce que la mé- thode du professeur nous semble avoir de vicieux en soi et d'incomplet relativement aux exigences et aux besoins de notre époque. J.-J.-F. HUE.