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397 est à leurs yeux le chef-d'œuvre de l'exposition philosophique, et ils considèrent comme la plus haute manifestation de l'intel- ligence, la formule abstraite et prosaïque de la vérité. En proclamant la sagesse incompatible avec la p o é s i e , on a privé le génie philosophique des ailes de l'enthousiasme et de l'amour. Les savants ont perdu le sentiment de la beauté qui est la vraie forme de la sagesse ; ils n'ont pas voulu compren- dre que ces hommes auxquels la science vient par le cœur et par l'inspiration , en savent plus qu'eux sur toutes choses ; la science s'est agrandie à leurs yeux aux dépens de l'art, de toute la supériorité du réel sur la fantaisie. Il faut l'avouer, les hom- mes qui prennent le titre de poètes se sont trop vite résignés à la condition inférieure qui leur élait faite, et la poésie cette antique prêtresse des peuples , n'a plus été qu'une chanteuse vulgaire à laquelle on a demandé quelques heures d'amuse- ment. La prose , ou la parole abstraite , est-elle comme on l'a cru le langage par excellence de la vérité ; les savants qui parlent celte langue possèdent-ils une plus large part de la sagesse que ceux qu'ils nomment avec dédain des hommes d'imagina- tion; leur pensée s'assimile-t-elle mieux le v r a i , leur expres- sion est-elle plus conforme à la nature des choses? non; celle pensée est incomplète, aussi incomplète que la matière qui ne parle qu'aux yeux. Au-dessus du savant et de l'artiste , s'élève un genre synthétique qui les domine ; quand il fait jaillir une i d é e , elle brille sous la beauté de l'image et sous l'achèvement de la forme, comme la parole divine sous la splendeur de la création ; le don de sentir et de reproduire celte intime alliance del'ame et d e l à forme dont l'univers est l'expression suprême? c'est ce qu'il y a dans l'homme de divin et de créateur, c'est la poésie. Que ceux donc qui pétrissent la matière, ou qui arpen- tent le vide de l'abstraction sachent qu'ils ont un supérieur, et reconnaissent que l'œuvre du poète est la moins incomplète et la moins périssable des œuvres de l'esprit humain.