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  Les princes auraient dû prendre pitié de ces malheureux
qui couraient à leur perle : quelques coups de canon en eus-
sent fait justice. Mais Luther ne le voulait pas. On dirait d'un
combat romain. Tout se passe comme dans le récit de Tile-
Live. D'abord, la harangue militaire, puis., la charge que
sonnent les trompettes.
   Les rebelles n'avaient pas d'artillerie, et presque pas d'armes
à feu : au moment où ils entendirent les clairons ennemis,
ils se jetèrent à genoux, et entonnèrent un cantique au Saint-
Esprit. Un arc-en-ciel parut tout à coup au dessus de leurs
tètes : les rebelles le saluèrent comme un présage de victoire.
   Ce fut une boucherie plutôt qu'une lutte régulière. Les pay-
sans tendaient le cou en chantant au Seigneur qui n'envoya
pas son ange pour les délivrer, suivant la promesse de Mûn-
zer. Le fer était las de donner la mort : on envoya la cavalerie
pour passer sur le ventre de tout ce qui respirait encore. Les
mineurs seuls qui se confiaient à leurs marteaux opposèrent
une vive résistance. Ils combattaient encore quand les t r o m -
pettes de l'arrnée des princes avaient sonné la victoire. Aucun
ne demanda quartier. Tous mouraient en vomissant avec leur
sang des imprécations contre leurs tyrans, et, dit Sleidan,
pour la gloire du nom de Dieu et l'affranchissement de leur
patrie.
   Un de ces malheureux qui s'était vaillamment battu fut pris
et conduit devant le landgrave Philippe de Hesse.—Voyons,
lui dit le landgrave, qui aimes-tu mieux du régime des prin-
ces ou de tes paysans ? — Ma foi, Monsigneur, lui répondit le
prisonnier, les couteaux ne couperaient pas mieux quand
nous autres paysans serions les maîtres. On lui accorda sa
grâce.
   On amena dans le camp des vainqueurs Mûnzer qu'on avait
trouvé à Franckhausen étendu dans un lit qu'on lui avait prêté
tout sanglant, la poitrine à demi b r i s é e , et la pâleur de la
mort sur les lèvres. Les soldats qui le cherchaient passèrent
outre pour ne pas troubler les derniers moments d'un m o -