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mémoire néanmoins devrait en devenir touchante, par cet
involontaire sentiment de tristesse qui fait que des malheurs
obscurs vous émeuvent toujours, quand même ils ne vous as-
sombrissent pas le cœur, ainsiquefontd'illustres abaissements.
   C'est une semblable pensée qui a dicté à M. Boitel son his-
toire de la Chapelle des Pénilenls de la Miséricorde. Lorsque
les monuments disparaissent, au moins faut-il qu'ils revi-
vent sur le papier; ce dernier hommage leur est bien dû.
La chapelle des Pénitents a donc été rasée ; elle a fait pla-
ce à une grande et haute maison , et l'incurie qui a laissé
vandaliser la magnifique église des Jacobins, qui laisse user
aux vents et à la pluie les beaux restes de l'Observance , n'a
pas eu pour elle un sentiment de pitié, mais enfin la plume
de l'historien aura fait tout ce qu'elle pouvait faire.
   Il est peu de personnes dans notre cité qui ne se souvien-
nent d'avoir vu, au coin de la rue des Augustins, et adroite,
en débouchant sur la petite place de la Miséricorde, une cha-
pelle qui ne s'ouvrait jamais que pour montrer qu'elle était
veuve de chants et de prières, et qu'elle n'avait plus ses fu-
nèbres solennités d'autrefois. Quelle en était l'origine, quelle
en fut la destination ? c'est ce que l'on savait à peine, ou que
l'on savait d'une manière très vague. L'histoire locale, qui
enregistre tant de niaiseries et de futilités ne disait rien de ce
monument, et M. Boitel n'a eu, pour composer son livre,
que des paperasses tirées des archives de la ville. En glanant
quelques faits jetés çà et là, ou perdus sous un insipide verbia-
ge ; en recueillant les dates éparses, en parcourant aussi les
Iiéglements de la confrérie de la Miséricorde, il a pu coordoner
 des matériaux si incohérents , et arriver à faire un tout.
  Au commencement du XVIIe siècle, il y avait à Lyon un
de ces hommes dont les ancêtres étaient venus dans nos
murs, cent ans ou cent cinquante ans auparavant, et qui
devaient de belles fortunes à leur seconde patrie. Cœsar
Lauro (1), né à Milan , était un des plus habiles teinturiers
  (1) Il avait francisé sou nom, et s'appelait Laure.