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309 ainsi conçu : « L'ordonnance des Juifs, nous voulons qu'elle « soit gardée, qui est telle; c'est assavoir : que les Juifs ces" « sent de usures, blasphèmes, sors et caraz (sortilèges), et « que leur Talmus (Thalmud) et autres livres esquivalant « trouvés blasphèmes, soient ars (brûlés), et les Juifs qui « ce ne voudront garder soient boutés hors, et les trans- « gresseurs soyent loyaument punis , et si vivent tous les « Juifs de labeurs de leurs mains ou d'autres besoingues « sans usure. » Cette ordonnance fut exécutée avec un zèle sévère. Malgré ses dispositions hostiles au judaïsme, Louis IX laissa aux Israélites la faculté d'aller prier et se consoler dans leurs synagogues. Sans doute les Juifs obtinrent cette faveur par l'intercession du Saint-Siége. On n'a pas oublié que le souverain pontife appela sur les exilés la pitié royale et pro- clama la liberté de conscience que Rome condamne au dix- neuvième siècle. J'éprouve un serrement de cœur à noter cette contradiction, et pour me justifier de ce que j'avance je renvoie le lecteur au remarquable ouvrage de M. Beugnot: Les Juifs au moyen-âge (1). Je signalerai deux conciles tenus pendant la vie de saint Louis. Le premier, de l'année 1245 , eut son siège dans notre ville. Lyon , réputé alors ville impériale et relevant de l'Allemagne, était cependant toute française par le fait de sa position et de son esprit. Cette position douteuse de Lyon vis-à -vis l'Allemagne lui valut l'honneur de servir d'asile à (1) Je puis me tromper, mais j'aime à croire que la question de tolérance rentre dans le domaine des décisions temporelles du Saint-Siége bien plutôt que dans celui de ses doctrines spirituelles. Les premières, soumises aux modifications des théories gouvernementales du souverain pontife , varient, sans engager l'Eglise ; les secondes, au contraire, sont immuables dans leur infaillibilité; elles forment le dogme. La liberté de conscience, telle que je la comprends , n'esl-elle pas écrite dans cette parabole , où le laboureur , sans écouter les conseils de ses serviteurs, laisse germer et croître le froment et l'ivraie jusqu'au jour de la moisson?