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demain avec joie et édification , ayant satisfait à tous leurs
devoirs de piété et de religion.
   Lorsqu'Agobard eût achevé cette requête, il survint un
homme qui s'étant échappé de Cordoue en Espagne, rapporta
que depuis vingt-quatre ans et dans sa première enfance il
avait été enlevé par un juif qui l'avait vendu, mais il s'était
enfui avec un autre chrétien d'Arles, enlevé de même et
vendu depuis six ans par un juif. Agobard, s'emparant de
cette circonstance provoquée peut-être pour le besoin de
la cause, assure que les parents avaient reconnu l'esclave
fugitif: du reste, dit-il, la notoriété publique accuse les
Juifs d'en avoir enlevé beaucoup d'autres, et de le faire
tous les jours encore. Ce ne sont point là leurs moindres
forfaits, les Juifs commettent sous nos yeux des crimes plus
exécrables, que le respect, et la bienséance ne nons per-
mettent pas de vous écrire.
   Je me suis un peu appesanti sur cette première lettre, parce
qu'elle est une peinture fidèle et contemporaine de la lutte
de la religion juive et de la religion chrétienne, dans notre
Lyon du IXe siècle. Dessiné par la main d'Agobard, ce tableau
devait nécessairement paraître très sombre ; mais en faisant
la part des préventions ennemies, on peut encore facilement
découvrir de tristes vérités. L'état de magnificence dans le-
quel vivaient les Israélites, leur luxe d'esclaves, leurs rap-
ports journaliers avec Alexandrie, l'Arabie, l'Inde, la Grèce
l'Espagne et l'Allemagne , l'importation de leurs industries
nouvelles, et la plus grande circulation de numéraire, toute
la valeur réelle que l'extension de leur commerce procurait
à Lyon , tout l'éclat de ces bienfaits procurés à notre ville
par leur activité, avaient fini par séduire l'esprit de la popu-
lation et les faveurs des grands. Lyon devait beaucoup aux
Juifs, et sans s'inquiéter trop des justes appréhensions de
l'Eglise, il s'habituait à remettre en leurs mains la direction
des intelligences et la conduite des affaires publiques. Peu à
peu le respect menait à la croyance, les caresses et le bien-