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283 « Vous savez d'ailleurs, mon vénérable père, que tous ceux qui sont sous la loi sont sous la malédiction , qu'ils en sont enveloppés comme d'un vêtement, qu'ils en sont pénétrés jus- qu'aux os et dans les moelles, qu'ils sont maudits et aux champs et à la ville, en courant et en sortant, que leurs enfants, leurs animaux et leurs fruits sont sujets à la même malédiction; leurs greniers , leurs caves, leurs celliers et leurs offices , aussi bien que leurs viandes et les restes de leurs repas sont également maudits, et qu'ils ne peuvent être délivrés de ces malédictions que par celui qui s'est fait lui-même malédic- tion pour nous sauver. Tous savez aussi que non-seulement il faut éviter ceux qui ne veulent pas recevoir la prédication de l'Evangile ; mais encore que l'on commande, au sortir de leurs maisons et de leurs villes, de secouer la poussière de nos pieds, et qu'au jour du j u g e m e n t , ils seront traités avec plus de rigueur que ceux de Sodôme et de Gomorrhe. » Agobard renouvelle ses instances auprès de Nibridius pour l'engager à rester ferme, à menacer de la damnation éter- nelle ceux des fidèles de son Eglise qui voudraient commu- niquer avec les Juifs, et enfin à exhorter les évêques et ses confrères pour que tous, agissant dans un même e s p r i t , ôlent de l'Eglise un si grand mal. Le prélat de Lyon, pour parvenir plus sûrement à ses fins, clôt sa lettre par une flatterie : « Nous avons une si grande confiance en vous, que nous croyons que ce grand dessein subsistera, si vous l'ap- p u y e z , ou tombera, si vous l'abandonnez; ce qu'à Dieu n e p l a i s e , mais qu'au contraire, ce Dieu dont la patience est infinie, et qui nous remplit de consolation, nous donne tou- jours à l'un et à l'autre des sentiments conformes à la sa- gesse de Jésus-Christ. » Agobard adresse de préférence cette lettre à l'archevêque d e N a r b o n n e , parce qu'il est probable que dans le neuvième siècle, comme dans le douzième, Narbonne était déjà la Jérusalem nouvelle, la capitale du monde juif, et notre prélat voulait contrebalancer par de grands coups l'empiétement